Page 701 - Merveilles Industrie Tome 4
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LES CONSERVES ALIMENTAIRES. 695
séchés ensuite se conservent, avons-nous en feuilles ; Rueil et Colombes, les haricots
dit, sans aucune altération pendant un verts et les pommes de terre.
grand nombre d’années. Au contraire, ceux La fabrication des légumes secs par la
que l’on a simplement desséchés sans coc méthode Chollet et Morel-Fatio, avait déjà
tion antérieure finissent par s’altérer. Ce fait des progrès sensibles et reçu une assez
fait est certain; mais comment l'expliquer grande impulsion, lorsque la guerre d'Orient
scientifiquement? Il faut admettre que le vint ouvrir à ses produits un très-important
végétal, desséché sans coction préalable, débouché. Les ministres de la marine et
renferme une matière albuminoïde, la de la guerre adoptèrent, en 1854, l’usage
quelle, agissant plus tard comme ferment de ces nouveaux produits, et l’on fit surtout
sur la substance végétale, détermine sa dé une consommation considérable de la ju
composition. Mais si l’on coagule par la lienne de troupe, qui est un composé de
chaleur ce principe albuminoïde, on détruit carottes, de pommes de terre, de choux, de
le ferment, et l’on met ainsi la substance navets et d’oignons. Les commandes poul
végétale à l’abri de la fermentation et de ie ministère de la guerre s’élevaient, pen
toute altération ultérieure. C’est par ce rai dant la guerre de Crimée, à 120,000 rations
sonnement théorique fait à priori, et qui par jour en hiver, et 40,000 en été. Les en
découle des nouvelles idées sur la cause de vois pour l’armée sarde étaient de 15,000 ra
la putréfaction, rapportée comme les autres tions par jour; enfin, la marine et l’ar
fermentations à un être vivant, que l’inven mée anglaise recevaient, à la même époque,
teur du procédé que nous venons de décrire des approvisionnements importants des
fut conduit à sa découverte. mêmes produits.
Ainsi, les deux établissements industriels
créés pour la conservation des légumes, Des difficultés financières, survenues à la
c’est-à-dire celui de M. Chollet et celui de suite de la guerre de 1870-1871, ont amené
M. Morel-Fatio, arrivaient au même ré la disparition de la plupart des usines de
sultat par des moyens qui différaient sous M. Chollet. D’ailleurs, le procédé employé
plusieurs rapports. Au lieu de s’établir en dans ces usines étant tombé dans le domaine
rivaux et de se faire une guerre commer public, par suite de l’expiration des brevets,
ciale, qui aurait certainement retardé les divers industriels, à Paris et dans les dépar
progrès et compromis l’avenir de cette in tements, le mettent aujourd’hui librement
dustrie, les concurrents prirent le sage parti en pratique.
de se réunir. Les deux compagnies fusion Nous allons décrire, pour résumer ce
nèrent. qui précède, le mode de préparation qui est
Les produits de MM. Chollet et Morel-Fatio en usage dans ces différentes usines, pour la
prirent bientôt faveur. Plusieurs usines fu préparation des légumes par la dessiccation.
rent créées en diverses parties de la France. Les légumes arrivant des marchés ou des
L’usine centrale était à Paris, rue Marbeuf. jardins maraîchers, sont rapidement éplu
Elle desséchait l’excédant delà halle. Une chés et nettoyés par des ouvrières. Après
autre, celle de la Villette, desséchait les ce nettoyage, ils sont ensuite taillés en
choux de la plaine des Vertus. D’autres fragments de petit volume, par un couteau
usines furent bientôt créées en province. que la vapeur fait mouvoir, dans le sens
Meaux préparait les carottes ; le Mans, les horizontal, avec une prodigieuse vitesse.
pommes de terre et les petits pois ; Dunker Ainsi taillés en fragments, les légumes sont
que, les choux de Bruxelles et les légumes placés sur des claies et introduits dans la