Page 700 - Merveilles Industrie Tome 4
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694                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.

              exemple des juliennes pour l’alimentation   qu’après les avoir soumis à une coction
              des troupes, représente la ration de cent   préalable en les plaçant dans une boîte fer­
             vingt-huit hommes. Quant à la place qu’elles  mée où l’on fait arriver de la vapeur chauffée
              occupent, les résultats dépassent vraiment   au-dessus de 100°. Cette méthode pré­
              toute croyance. Une caisse de bois ayant à   sente cet avantage essentiel, que le légume
             l’intérieur 66 centimètres de long sur 25 de   ainsi traité n’a besoin d’aucune immersion
              large et 55 de profondeur, contient 1,800 ra­  préalable dans l’eau avant d’être accom­
              tions. On peut en mettre 25,000 dans une   modé : il suffit de le faire bouillir dans l’eau
              boîte de fer-blanc de la capacité d’un mètre   quelques minutes pour obtenir un mets
              cube. Chacune de ces rations renferme     excellent, un potage, etc. C’est là évidem­
             25 grammes de légumes secs qui, trempés  ment un résultat précieux pour les ménages,
             dans l’eau pendant quelques heures, repré­  aussi bien que pour les troupes en cam­
             sentent 200 grammes de légumes frais, et  pagne.
              constituent un excellent potage à la julienne.   Le procédé Morel-Fatio consiste donc à
              Un fourgon d’artillerie, qui cube ordinai­  cuire les légumes par l’action de la vapeur.
              rement 4 mètres, peut donc contenir la    On les dessèche ensuite rapidement, au
              ration de 100,000 hommes. Un seul four­   moyen d’un courant d’air, provoqué par un
             gon transportant les légumes destinés au   ventilateur, dans une étuve chauffée. 11 n’v a
              repas de 100,000 hommes! Ce résultat est  dans ce mode de traitement du légume aucune
              des plus remarquables.                    cause d’altération ; c’estune coction sèche, en
                                                        quelque sorte, sans l’intermédiaire de l’eau;
                Cependant on adressait certains reproches  on pourrait presque dire que le légume est
              aux légumes préparés par M. Chollet. Ils  cuit par son eau de constitution. Une fois
              exhalaient une odeur de fenaison assez  sec, il ne répand plus aucune odeur, même
              marquée, et cette odeur devenait, au bout  après deux heures d’exposition à l’air. 11 est
              d’un temps un peu long, d’une âcreté mani­  inaltérable, et ne demande pas plus de ména­
              feste. En outre, et c’était là l’inconvénient  gements pour sa conservation que les graines
             le plus grand, ils exigeaient une immersion  sèches du riz, ou les pâtes alimentaires
             préalable de quatre heures au moins dans  obtenues avec la farine des céréales.
             l’eau, pour être convenablement soumis à     Quelle peut être ici l’action de la vapeur?
             la coction.                                Il est facile de comprendre que les sucs
                Ces défauts, qui étaient certains dans les  végétaux, qui seraient dissous, enlevés par
             produits de M. Chollet, ont entièrement dis­  la coction dans l’eau, restent dans le légume
             paru dans les produits semblables qui furent   qui a été cuit par la vapeur sèche, et lui
             fabriqués par une maison rivale, ayant à sa   conservent ses propriétés nutritives, comme
             tête des chimistes habiles, et pour patronage  son arôme particulier. De plus, les cellules,
             une puissante association financière.      qui forment en grande partie la masse du
               Pour préparer les légumes destinés à la   tissu végétal,ne sont pas gonflées, déchirées,
             conservation, l’usine Morel-Fatio et Cie fit   comme elles le seraient par l’action de l’eau
             usage d’un procédé qui différait d’une ma­  bouillante ; lors de la dessiccation, c’est l’eau
             nière notable de ceux qui étaient employés  seule qui abandonne le légume, et lorsqu’on
             dans l’usine de M. Chollet. Ce dernier, appli­  veut l’accommoder pour la table, il suffit
             quant simplement le procédé Masson, des­   de lui restituer l’eau qu’il a perdue ; il re­
             séchait les légumes crus. Dans le système   prend alors son aspect primitif.
             Morel-Fatio, on ne dessèche les légumes      Les légumes cuits par la vapeur et des­
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