Page 660 - Merveilles Industrie Tome 4
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              ses applications économiques. Et notre ex­  plusieurs fois l’occasion de le dire dans le
              périmentateur ne revenait pas de sa surprise  cours de ce volume, M. Pasteur, avec beau­
               de voir le lait se conserver pendant un si  coup d'autres chimistes et micrographes, tels
               long intervalle, avec la seule précaution de  que Schwann,Hoffmann, Trécul, etc., attri­
               l’avoir fait bouillir et de tenir le flacon  bue la cause de la fermentation aux germes
               fermé.                                    de levùre et aux spores de champignons, et
                 Une dernière et très-curieuse expérience   autres végétaux microscopiques qui flottent
              que fit Gay-Lussac, et qu’il continua avec  toujours dans l'air en quantité considéra­
               la même persévérance, consista à faire bouil­  ble. Ce sont ces germes vitaux qui, en tom­
               lir tous les jours du lait dans un vase ou­  bant dans les liquides organiques propres à
               vert et abandonné à l’air. Ainsi soumis, une   subir la fermentation, y provoquent ce mou­
              fois chaque jour, à l’ébullition, ce lait se  vement d’intestin qui n’est, d’ailleurs, autre
              conserva pendant plusieurs mois sans su­   chose que le développement des germes ou
              bir la plus légère altération. Gay-Lussac  des spores végétaux qui abondent dans ces
              croyait expliquer suffisamment ce fait en   milieux chargés de matières organiques.
              disant que la petite quantité d'oxygène que  M. Pasteur explique donc la méthode
              ce liquide absorbait chaque jour par son   d’Appert en disant que par ce mode opé­
              exposition à l'air, était détruite chaque jour  ratoire on exclut des boîtes, non l’oxygène
              par le fait de l’ébullition. Cette petite quan­  de l’air, comme le pensait Gay-Lussac,
              tité d’oxygène se combinait à l’un des élé­  mais bien les germes microscopiques que
              ments du lait, de telle sorte que, l’agent  cet air renferme. En chassant jusqu’à la
              provocateur de la fermentation étant con­  dernière trace d’air de l’intérieur des boîtes,
              stamment éliminé, la fermentation devenait  on empêche les germes de tomber sur la
              impossible. Mais, comme on le sait aujour­  matière organique, de s’y développer et d’y
              d'hui, il faut donner à cette expérience une  provoquer la fermentation putride.
              tout autre explication, et y voir l’action   Tous les détails de la méthode d’Appert
              destructive de la chaleur sur les ferments  telle qu’on l’exécute aujourd’hui, avec les
              qui provoquent la décomposition du lait.   précautions multiples que demande sa mise
                 Quoi qu'il en soit, Gay-Lussac admit que,   en pratique, s’expliquent parfaitement avec
              dans la méthode d’Appert, il y a absorption,   la théorie de M. Pasteur. La première opé­
              par l’effet de la chaleur, de l’un des élé­  ration consiste à soumettre la matière à une
              ments de l’air qui est contenu dans les  température de1U8° : cette élévation de
              liquides qui remplissent les boîtes. Cet élé­  température a pour effet de tuer tous les
              ment une fois absorbé, les matières organi­  germes ou spores végétaux. La deuxième
              ques persistent en cet état pendant un grand  opération est la fermeture hermétique des
              nombre d’années.                           boîtes par leur soudure à l’étain : cette pré­
                La théorie de Gay-Lussac qui attribue à   caution a pour but d’empêcher la rentrée
              l’oxvgène de l’air la propriété d’exciter la  dans la boîte de tout germe extérieur. Dans
              fermentation dans les matières organiques,   une troisième opération, qui ne s'exécute pas
              et qui explique la méthode d’Appert en di­  toujours, mais qui assure une conservation
              sant qu’elle exclut toute trace d’oxygène de  presque indéfinie, on maintient pendant
              l’intérieur des vases où l’on renferme les  quelque temps dans l’eau bouillante la boite
              substances alimentaires, a été professée sans  fermée ; cette dernière opération s’explique
              contestation jusqu’aux travaux de M. Pasteur  dans la même théorie, en disant que l’on tue,
              sur la fermentation. Comme nous avons eu   par l’élévation de température, les germes
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