Page 63 - Merveilles Industrie Tome 4
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LE PAIN ET LES FARINES.                                 57

       avait soin de n’introduire cette farine qu’à-  cédé, pour faire comprendre les avantages
       près avoir fait subir au reste de la pâte une  que l’auteur en attendait.
       fermentation de plusieurs heures.           Quand on a extrait, par les procédés ha­
         Il eut d’abord l’idée de faire cette sépara­  bituels de mouture, les farines dites pre­
       tion en jetant dans l’eau les recoupes et le  mières, à 70 pour 100 de blutage, qui com­
       son. La membrane embryonnaire surnageait,  prennent la fleur de farine et les premiers
       avec le son, réduit à la partie ligneuse. On  gruaux, il reste, pour 100 parties de bou­
       n’avait qu’à enlever ces matières surna­  lange, 7 parties de gruaux blancs, 5 parties
       geantes, et l’eau retenait les produits de la  de gruaux bis et 16 parties de sons, gros et
       farine perispermique, qui sont nutritifs. On  petits. Dans le système de M. Mége-Mouriès
       pouvait les utiliser immédiatement ; il suffi­  lé meunier faisait repasser les gruaux blancs
       sait de mélanger celte eau avec de la farine  sous la meule et passer les gruaux gris au
       blanche et de pétrir le tout ensemble.   sasseur mécanique. Il mettait à part la farine
         Ce système avait l’inconvénient d’exiger  première, les gruaux blancs et les gruaux
      la manipulation de masses d’eau consi­    gris, qui devaient être employés séparément
      dérables. M. Mége-Mouriès chercha donc  par le boulanger.
      un autre moyen mécanique de séparer la       Quant à la manière de fabriquer le pain,
      membrane embryonnaire. Un mécanicien,     les levains étaient préparés exclusivement
      M. Périgaud, d’Amiens, avait inventé un  avec de la farine première à 70 pour 100 de
      appareil qu’il nommait aspirateur-sasseur.   blutage. Si l’on employait à cet usage les
      Cet appareil parut à M. Mége-Mouriès très-  gruaux blancs et les gruaux gris, la céréaline
      propre à remplir l’objet désiré. Il fut ins­  qu’ils pourraient retenir en petite quantité
      tallé, en 1860, à la boulangerie centrale   exposerait la pâte à prendre par la fermenta­
      des hôpitaux de Paris, établissement qui, à  tion la couleur bise que l’on veut éviter.
      cette époque, s’était donné la mission d’ex­  Les trois qualités de farines qui entraient
      périmenter les procédés nouveaux relatifs  dans la confection du pain par le procédé
      à l’art de la meunerie et de la boulangerie.  Mége-Mouriès, étaient ainsi réparties :
        Voici à peu près en quoi consistait aspi­
      rateur-sasseur de M. Périgaud.               Gruaux bis sassés.......................... 27  parties.
        Une turbine à air détermine une puissante   Gruaux blancs................................. 3   —
                                                   Farine première blutée à 70
      aspiration, dans un coffre rectangulaire al­   pour 100......................................... 26   —
      longé, muni de tablettes horizontales, for­
      mant une série de compartiments, étagés les   Au commencement de chaque opération,
      uns au-dessus des autres. Les gruaux bis  on divisait le levain en deux parties. L’une
      parcourent un tamis plan légèrement in­   servait à faire la pâte, l’autre à faire le le­
      cliné, qui est secoué par une came, dans  vain delà fournée suivante.
      1 intérieur d’une capacité en bois. Les par-   M. Mége-Mouriès annonçait devoir aug­
      lies les plus lourdes passent à travers les   menter de 12 pour 100 la quantité des pro­
      mailles du tissu de soie, tandis que les dé­  duits de la mouture utilisables pour la fa­
      bris plus légers de la membrane embryon­  brication du pain blanc. Il devait porter
      naire, se déposent sur les tablettes.     cette quantité, de 70 pour 100 qu’elle était, à
        Tel fut l’appareil qui servit, en 1860, à  80 ou 82 pour 100.
      expérimenter le procédé de mouture pro­     On voit que le procédé Mége-Mouriès con­
      posé par M. Mége-Mouriès. Nous allons main­  sistait surtout dans un mode particulier
      tenant donner quelques détails sur ce pro­  d’exécuter la mouture des grains. C’est
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