Page 605 - Merveilles Industrie Tome 4
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LES HUILES.                                   599

          Le pavot œillette se compose d’une tige   on procède au battage du fruit, pour en
        droite, cylindrique, haute de 1 mètre à 1   extraire la graine. Pour cela, on porte dans
        mètre et demi et ramifiée à 2 ou 3 déci­  le champ, près des faisceaux, une cuve en
        mètres du sol. Les feuilles, qui sont larges  bois. Un ouvrier prend un faisceau, et le
        et embrassent la lige, sont dentées. Ses  frappe de petits coups secs, avec un bâton
        (leurs, grandes et belles, forment une sorte  très-court, de 3 centimètres de diamètre.
        de pavillon richement coloré, enveloppant  Quand il ne sort plus de graines de la capsule
        les pétales. Les fruits (nommés vulgaire­  battue, l’ouvrier remet la botte déplantés à un
        ment capsules ou têtes') sont ronds et divisés,   aide, et en prend une autre poignée, pour la
        à l’intérieur, par douze ou treize rayons,qui,  battre également. Quand les bottes qui com­
        plus tard, contiennent les graines.       posent un faisceau ont été battues et remises
          Quand elle est verte, la plante a une odeur  en tas, on transporte, à l’aide d’une brouette,
        vireuse. Les tiges et la capsule sont gonflées  la cuve près du faisceau suivant, et l’on
        d’un suc laiteux, qui, dans une autre espèce,   continue le battage.
        fournit, après l’incision des capsules, un   Les faisceaux que l’on a reformés, quand
        liquide épais, lequel se desséchant à l’air et  ils sont restés six à huit jours exposés à l’ac­
        étant recueilli constitue l’extrait narcotique   tion de l’air et du soleil, donnent de nou­
        appelé opium, dont l’usage est si répandu en  velles graines par un second battage. On
        médecine, et qui est considéré, avec raison,   procède àcetteseconde opération,quifournit
        comme un véritable bienfait donné par la   une nouvelle quantité de graines (2 hecto­
        providence à l’humanité, pour apaiser ses  litres environ par hectare), ce qui couvre
        souffrances dans le cours des maladies,   suffisamment le prix de la main-d’œuvre.
          Les fleurs du pavot œillette s’épanouissent   Ainsi extraites, les graines de pavot sont
        au mois de juin dans les climats du Nord, et  portées au grenier, et étalées en couche de
        en mai dans le Midi.                      20 centimètres d’épaisseur environ. On ne
          Le pavot vient par semis, que l’on fait au  doit les réunir en tas volumineux que lors­
        mois de mars. Ces semis s’opèrent sur des  qu'elles sont entièrement sèches : on les
        lignes parallèles, soit à la main, soit avec un  agite alors une ou deux fois par semaine.
        semoir à cheval ou à brouette. Au bout de   Lorsqu’elles sont entièrement sèches ou
        quinze à vingt jours,la plante a germé et les  qu’elles doivent être vendues, on soumet les
        premières feuilles apparaissent à la surface  graines à l’action d’un crible dont les trous
        du sol.                                   sont un peu plus grands que le diamètre des
          Pendant son développement, le pavot  graines, pour en séparer les débris de cap­
        exige beaucoup de soins.Des binages,des sar­  sules, de feuilles et de tiges qui y sont
        clages répétés sontindispensables.il fautéga-  mêlés. Ces débris restent sur la toile métal­
        lement le défendre des ravages des insectes.  lique du crible.
          C’est au mois d’août, dans les contrées du   La graine qui a traversé les mailles du
        Nord et de l’Est, et en juin dans le Midi, que  crible, n’est pas encore nettoyée ; elle re­
        se fait la récolte des capsules, ou tètes de pa­  tient ordinairement un peu de poussière,
        vot. Il faut, pour les récolter, que les  dont on la débarrasse en la soumettant à
        graines soient libres et résonnent dans les  l’action du tarare.
        têtes, quand on les agite. On arrache les   Si l’on doit conserver la graine en maga­
        plantes de terre, et on en confectionne des  sin, pendant plusieurs mois, il faut avoir
        faisceaux, que l’on abandonne sur le sol.  soin, chaque mois, de la passer au tarare,
          Douze à quinze jours après l’arrachage,   pour écarter les mites.
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