Page 469 - Merveilles Industrie Tome 4
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L’ALCOOL ET LA DISTILLATION.                               463

        condamnation d’Adam, faits sans réplique,   essentiellement nouveau, de la colonne ana-
       qui réfutaient d’avance toute récrimination.  lyseuse, et il apportait à l’industrie du distil­
          On lit dans la Biographie d’Édouard  lateur une idée aussi neuve que féconde.
        Adam, de M. Girardin, réimprimée à        Ce n’étaient point là, comme le dit M. Gi­
        Rouen, en 1856 :                          rardin, « de prétendues inventions », c’é­
                                                  taient des inventions réelles et originales.
         <■ Des avantages aussi précieux, aussiincontestables   Et ce qui le prouve, c’est que les héritiers
        devaient attirer sur Édouard la protection et même   Adam trouvèrent bon, quand leur procès
        la faveur du gouvernement, et lui mériter la sympa­
        thie de tous les habitants d’une contrée qu’il enri­  fut perdu, de s’annexer la découverte d’Isaac
        chissait. Pour récompense de ses longs travaux et  Bérard. Le seul nom dé appareil Adam et
        de ses dépenses, il était juste, sans doute, qu’il fût   Bérard, sous lequel le nouvel alambic a
       assuré de la jouissance exclusive des fruits de son
       invention pendant un temps déterminé.      été vendu pendant si longtemps dans le
         « Mais, hélas, il n’en fut pas ainsi pour notre mal­  midi de la France, aurait dû suffire pour
       heureux concitoyen ;                       démontrer à M. Girardin que l’invention
         « De tous côtés, en effet, s’élevèren t des appareils
       calqués sur le sien, et n’en différant que par la   de Bérard n’était nullement, comme il le
        forme. En moins de quelques années, tous les brû­  prétend, une contrefaçon de celle d’Adam.
       leurs furent pourvus de nouvelles machines qui,   Par leur association avec Bérard, les héri­
       quoique bien inférieures à ses ingénieux alambics,   tiers Adam proclamèrent hautement le mé­
       étaient cependant supérieures à l’ancien appareil;
       de sorte que le privilège sous la protection duquel   rite de l’invention de Bérard.
       il s’était placé devint tout à fait illusoire. Fort de j   M. Girardin va plus loin encore dans la
       1 esprit et du texte des lois des 21 janvier et 23   voie de la partialité. Dans ses Leçons de
        mai 1791, Adam attaqua devant les tribunaux les |
       chefs de ces entreprises, qui s’étaient aussi pourvus i   chimie élémentaire (1), il attribue, d’un trait
       de brevets d’invention. Il pensait que, pour obtenir   de plume, à Édouard Adam toutes les dé­
       justice, il lui suffisait de prouver que ces prétendues   couvertes qui ont été faites postérieurement
       inventions n’étaient qu’une imitation de ses princi­  à cet inventeur, dans la construction des ap­
       paux moyens et procédés, mis en action sous des
        formes différentes. Mais, malgré tout son bon droit,   pareils pour la distillation des vins. Il donne
        malgré les savants et généreux efforts du chimiste   le dessin de l’appareil Derosne et Cail, en
       Anglada et du docteur Roche, qui publièrent des   l’attribuant à Édouard Adam.
        mémoires extrêmement remarquables pour démon­
        trer la justice de la cause d’Édouard Adam, il suc­  « L’appareil fondamental d’Édouard
        comba dans une lutte qui dura plusieurs années. »  « Adam, plus ou moins modifié dans quel­
                                                  le ques-unes de ses parties, suivant les locali-
          Quels sont donc ces appareils qui, selon   « tés, est composé, dit M. Girardin, de cinq
       M. Girardin, « s'élèvent de tous côtés, » qui   « pièces principales. » Puis il décrit l’appa­
        sont « calqués » sur l’appareil d’Edouard  reil Derosne et Cail, qu’il intitule, Appareil
       Adam et « n’en diffèrent que parla forme » ?  d'Adam, perfectionné par Derosne et Cail.
        Ils se réduisent aux appareils des deux in­  Voilà une étrange façon de présenter les
       venteurs qui ont toujours prétendu lutter à  choses ! L’appareil Derosne et Cail, dont
        armes égales contre Edouard Adam, à sa­   nous mettrons plus loin le dessin sous les
        voir : celui de Solimani, construit antérieure­  yeux de nos lecteurs, est un admirable sys­
        ment au système d’Édouard Adam, et qui  tème, qui résume les perfectionnements
        Remportait de beaucoup sur cet appareil .  apportés par une série d’inventeurs aux ap­
        par la précision de sa construction et l’ex­  pareils d’Adam et Bérard, inventeurs parmi
        cellence de ses résultats, et celui d’Isaac j  lesquels il faut citer surtout Cellier-Blu-
        Bérard, qui n’était nullement « calqué » sur .  menthal, Dubrunfaut, Derosne et Cail. Ces
        celui d’Adam, car il reposait sur le principe |   (1) In-8. Paris, 1873, t. III, 5' édit., page 510.
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