Page 468 - Merveilles Industrie Tome 4
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                 arrête dans l’ardeur qu’il apportait au tra­ ' trois inventeurs qui ont suivi des routes
                 vail et aux recherches.                   différentes, qui ont résolu le même problème
                   Il mourut d’une hydropisie, le 8 février  par des moyens divers. Dans les premiers
                 1819. Quant à l’association des inventeurs  temps, les inventeurs, forts de leurs idées et
                 brevetés dirigée par Durand-Palerme, elle  de leurs découvertes, se retournent les uns
                 ne produisit que de médiocres bénéfices. Le  contre les autres; ils s’incriminent, ils se
                 seul profit qu’Isaac Bérard obtint jamais de  querellent, ils engagent même des procès.
                 son invention, fut la vente des licences pen­  Mais le jour se fait, la question s’éclaircit, les
                 dant les premiers temps de sa découverte.   animosités s’apaisent; au besoin les tribu­
                 Il ne légua à sa fille, Mmo Maurin-Bérard,   naux interviennent et prononcent. Alors,
                 que la suite d’un procès avec les héri­   les intéressés, ramenés au vrai sentiment
                 tiers Adam, procès qui devait durer plus  des choses, oublient leurs rivalités; ils se
                 de trente ans et dont elle ne devait rien  tendent la main, mettent en commun le
                 retirer. Le procès intenté par la fille d’Isaac  résultat de leurs travaux, et exploitent en­
                 Bérard, à la maison Durand-Palerme pour  semble une découverte qui doit tourner au
                 redditionsde comptes, s’est terminé, en 1853,  bénéfice général de la société. C’est ce qui
                 par la liquidation d’un dividende nul.    arriva pour l'appareil à distiller les vins et
                   Telle est l’histoire exacte du procès et de  les liquides alcooliques. Les inventeurs,
                 l’accord définitif des héritiers Adam et Bé­  Edouard Adam et Isaac Bérard, ayant réuni
                 rard, lutte qui a longtemps occupé les esprits  leurs brevets, exploitèrent en commun leurs
                 dans le midi de la France. J’ai pu la rappeler  appareils, et, pendant plusieurs années, la
                 d’autant plus exactement qu’elle a été sou­  société dirigée par le banquier Durand-
                 vent racontée devant moi, pendant mon en­  Palerme vendit dans le bas Languedoc,
                 fance, mon oncle Pierre Figuier ayant été,   soit les appareils distillatoires d’Édouard
                 comme on l’a vu, l’un des experts et l’un  Adam et de Bérard, soit les licences pour
                 des auteurs des rapports qui fixèrent l’opi­  les construire.
                 nion du tribunal de Montpellier.            Tout le midi de la France connaît ces
                                                           faits. Cependant un chimiste, un écrivain,
                                                           animé d’ordinaire d’un esprit plus équitable
                                                           dans l’appréciation des travaux des indus­
                                                           triels et des savants, M. Girardin, de Rouen,
                              CHAPITRE V
                                                           les a présentés sous un jour complètement
                 COMMENT ON ÉCRIT L’HISTOIRE DES INVENTIONS MO­  inexact. Alors que le procès des héritiers
                  DERNES. — M. GIRARDIN, DE ROUEN, ET SA BIOGRAPHIE
                                                           Adam et Bérard était oublié, M. Girardin
                   d’édouard adam. — rectification des erreurs de
                                                           alla ressusciter cette vieille querelle, en
                  M. GIRARDIN. — HONNEURS RENDUS A ÉDOUARD ADAM. —
                   INJUSTE OUBLI DES DROITS b’iSAAC BÉRARD.  faisant preuve d’une singulière partialité
                                                           pour son compatriote. M. Girardin pu­
                   L’histoire des découvertes d’Edouard  blia, en 1836, dans la Revue de Rouen, une
                 Adam et d’Isaac Bérard et des débats i  Biographie d’Edouard Adam, dans laquelle
                 qu’elles ont provoqués, est bien simple. >  l’inventeur rouennais était exalté, au détri­
                 C’est celle de toutes les grandes inventions '  ment et au mépris de tous ses compétiteurs,
                 qui répondent à un besoin essentiel de l’in- '  sans tenir le moindre compte ni de l’opi­
                 dustrie ou des arts. 11 y a un but à atteindre,   nion des savants contemporains, ni du juge­
                 un grand résultat à réaliser; ce but est  ment du tribunal de Montpellier, ni de l’as­
                 atteint, ce résultat est réalisé par deux ou  sociation des deux inventeurs qui suivit la
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