Page 453 - Merveilles Industrie Tome 4
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L’ALCOOL ET LA DISTILLATION. 447
trieux et une grande aptitude pour les arts talliques de plus en plus froides, et com
mécaniques. muniquant les unes avec les autres par de
A vingt-deux ans, il créa au Grand-Gal- petites ouvertures percées au haut ou au
lorgues une fabrique d’eaux-de-vie. A peine bas de ces plaques. L’eau, qui est moins
eut-il commencé d’exercer cette industrie, volatile que l’alcool, se condensait dans
qu’il songea à simplifier l’opération de la dis les premiers compartiments, et l’alcool,
tillation des vins, qui était alors, comme nous dont les vapeurs franchissaient, sans se con
l’avons dit, longue et compliquée, par suite denser, toutes ces petites chambres aux pa
de la nécessité de rectifier plusieurs fois les rois métalliques, arrivait sensiblement prive
produits, si l’on voulait obtenir du trois-six. d’eau dans le dernier compartiment. En
IsaacBérard n’employa pas moins de treize employant un nombre suffisant de dia
ans à réaliser l’invention de son cylindre phragmes, on arrivait à recueillir, à l’extré
analyseur à plaques métalliques, ou à dia mité de cette colonne, de l’alcool presque
phragmes , qui produisait la séparation, entièrement privé d’eau. Et si l’on voulait
l’analyse, du mélange de vapeurs d’eau et obtenir simplement de l’eau-de-vie, on
d’alcool provenant du vin, et qui permettait n’avait qu’à recueillir, au moyen d’un
d’obtenir, à volonté, de l’alcool à divers états robinet, le liquide condensé dans la pre
de concentration. Ce fut en 1804 environ que mière case. Au lieu de l’encombrant appa
ses idées furent définitivement arrêtées et reil d’Edouard Adam, dont l’installation
son alambic construit. nécessitait des frais énormes, un cylindre
11 est bien remarquable qu’un simple de petite dimension, qui s’adaptait à toutes
brûleur de vins, un homme dépourvu de les chaudières et ne changeait rien à l’ou
connaissances scientifiques et n’ayant que tillage des distilleries, produisait ce résultat
son propre fonds d’observations puisées dans étonnant.
l’exercice de sa profession, ait pu, sans aucun Ce ne fut pas, on le comprend, sans de
secours ni conseils, non-seulement conce grandes difficultés qu’Isaac Bérard réussit à
voir le principe de la colonne analyseuse, qui construire le premier modèle de son alam
est la base des appareils actuels pour la distil bic. Craignant de devenir la risée du village,
lation des liquides alcooliques, mais encore si on le savait occupé à la poursuite d’une dé
construire l’appareil de manière à le rendre couverte scientifique, et voulant, d’ailleurs,
immédiatement pratique, et répondant aux tenir son entreprise secrète, soit qu’il réussît,
besoins de l’industrie de son temps. Pen soit qu’il échouât, il s’enveloppait d’un
dant qu’Edouard Adam, obéissant aux pré grand mystère. Sa fabrique d’eaux-de-vie
ceptes et aux leçons du chimiste Solimani, donnait sur un jardin. Au fond de ce jardin,
construisait son appareil à œufs, en copiant il fit construire un atelier particulier, dans
servilementles flacons de Woolf, et commet lequel il n’admettait personne. Pour ne
tait la grande faute de produire dans la point divulguer le mécanisme de son cylin
chaudière une pression toujours dangereuse, dre à plaques métalliques, il commanda les
plus dangereuse encore avec un liquide in pièces à différents chaudronniers, et il fit
flammable comme l’alcool, Isaac Bérardcons assembler ces pièces par d’autres chaudron
truisait son appareil,qui fonctionne sans pres niers. Par un véritable trait de génie, il
sion et qui, avec une simplicité vraiment mer avait inventé le robinet à trois eaux, que l’on
veilleuse, accomplit l’analyse, la séparation trouve dans tous les appareils modernes, et
desvapeurs d’alcool et d’eau, parleur simple qui lui servait à diriger à volonté les vapeurs
passage à travers une série de plaques mé du vin dans l’un ou l’autre des trois coin-