Page 450 - Merveilles Industrie Tome 4
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444 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
raître sur l’horizon, et qui l’a déjà rempli de lumière. « Adam s’attendait à mes reproches, et il s’y était
Il ne reconnaît d’autre maître que lui ; Woolf lui a préparé. Il me répondit avec le sang-froid d’un
bien fourni son appareil ; Rumfort lui a bien appris homme qui est bien décidé à tout sacrifier à son
que les liquides pouvaient être chauffés par le moyen intérêt : Oui, il est vrai que vous m’avez fait connaître
de la vapeur ; Solimani lui a bien enseigné à faire les avantages de l’appareil de Woolf, appliqué à la
l’application de ces principes à l’appareil de Woolf, et distillation des vins ; mais les principes d’après les
à se servir de cet appareil pour la distillation des quels j’ai opéré sont tout différents des vôtres. Les
vins ; mais n’importe, c’est Adam qui a tout fait, plans que vous m’avez donnés ne sont pas ceux dont je
■c’est lui qui a tout créé : Dixit et lux facta est. me suis servi; j’ai tout changé, et je vous défie (car les
« Quel génie que celui d’Adam ! ou, pour mieux jactances etles défis ne lui coûtent guère) d’exécuter
dire, quel talent que celui du professeur que l’on ce que j’ai fait avec les moyens que vous m’avez in
appelle aujourd’hui ignorant, inepte, et qui, néan diqués.
moins, lui a fait faire des progrès si rapides en si « J’accepte le défi et je prends l’engagement d’exé
peu de temps ! cuter, avec l’appareil de Woolf seulement, les
« Mais Adam persistera-t-il à soutenir ce qu’il a mêmes expériences faites à Montpellier par le sieur
avancé? Eh oui, sans doute, Adam connaît parfaite Adam (1). >>
ment sa position ; il sait qu’il est à Montpellier, loin
de mes regards, et qu’il n’a rien à craindre de ma
présence. Un seul mot de ma part peut le décon Nous ne pousserons pas plus loin les cita
certer ; mais ce mot, peut-être que je ne le pronon tions de cet éloquent écrit. Solimani ajoute
cerai pas ou que je ne le prononcerai que lorsqu’il qu’il répéta avec un simple appareil de
aura fait des dupes ; car à Montpellier on ne le con Woolf, l’expérience faite à Montpellier en
naît pas, on ne sait pas qui il est, on ne sait pas ce
dont il est capable, et il peut hardiment se donner 1801 par Édouard Adam, pour la distilla
pour le plus grand homme du monde, pour le tion de l’alcool des vins.
successeur de Lavoisier, pour l’héritier de ses ta On ne saurait mettre en doute, après des
lents.
« 11 s’adresse à M. le préfet du département de faits aussi nettement articulés, qu’Édouard
l’Hérault, le prie de nommer des commissaires pour Adam ait dû l’idée de son appareil à Laurent
assister à des expériences qui sont, dit-il, le résultat Solimani. Ce dernier, d’ailleurs, trouvant
d'une invention qu’il vient de faire, et, en présence
•de ces commissaires, il atteste, sans honte et sans que l’appareil de Woolf appliqué à la distil
pudeur, que cette découverte est le fruit d’un travail lation des vins, ne donnait pas une bonne
assidu et de plusieurs essais qui lui ont coûté de solution du problème cherché, inventa un
grandes dépenses. 11 garde le plus profond silence appareil nouveau. Et c’est cet appareil que
sur mon compte, il ne prononce pas une seule fois
•mon nom, de peur que ce nom, plus connu que le nous avons à faire connaître.
sien, ne fasse naître quelque doute sur la vérité de L’appareil distillatoire de Solimani se
ses assertions. Il prend, en effet, en son particulier et composait, d’abord, d’une sorte de généra
sans me rien communiquer, des arrangements avec
une maison opulente de Montpellier. teur à vapeur en forme de parallélogramme,
a Cette conduite étrange eut lieu de m’étonner. Je long de 3 mètres et large de 1 mètre,
savais que l’on doit peu compter sur la reconnais chauffé par un fourneau, sur lequel il re
sance de ceux qu’on oblige ; mais l’ingratitude d’A-
<lam était d’une espèce toute nouvelle, et son audace posait. Ce générateur, recouvert d’une voûte
égalait son ingratitude. Cependant je ne m’en plai solide, était pourvu d’une soupape de sûreté
gnis pas ; je me flattais que si je pouvais lui parler, je et d’un indicateur de niveau .
lui ferais désavouer une pareille conduite, en lui Deux chaudières à vin, supportées par des
représentant toute la bassesse de son procédé et en
lui faisant comprendre combien il m’était aisé de barres de fer, étaient plongées dans l’atmo
lui enlever l’honneur d’une découverte qu’il s’attri sphère de vapeurs fournie par le générateur.
buait faussement. Les chapiteaux de ces deux chaudières se
« J’attendis donc patiemment son retour de Mont
pellier, et lorsqu’il vint chez moi pour me voir, je (1) Réponse du sieur Solimani, médecin, ancien profes-
lui reprochai devant plusieurs amis l’inconvenance fesseur de chimie, membre de plusieurs académies, habi
de ce qu’il avait fait. Je lui dis que j’allais réclamer, tant à Aimes, au mémoire du sieur Édouard Adam, ayant
et que le public jugerait lequel de nous avait pu pour titre Observations. In-4°. A Nîmes, chez la veuve
proposer quelque chose d’utile dans la distillation. Belle, imprimeur, pages 1-11.