Page 442 - Merveilles Industrie Tome 4
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                 tousles compartiments, II,H', de la caisse, E,   dans laquelle les distillateurs apporteraient
                 déposait dans chacun de ces compartiments  eux mêmes le vin.
                 ses parties les plus aqueuses, dont la quan­  Cette seconde expérience eut le même
                 tité allait sans cesse en diminuant de com­  résultat : la bonne foi de l’opérateur et
                 partiment en compartiment.                 l’excellence de son appareil étaient mis hors
                   Le serpentin, S, qui terminait l’appareil,   de doute du même coup, et il fut ainsi
                 servait à condenser les dernières vapeurs,   constaté qu’Edouard Adam avait obtenu la
                 uniquement composées alors de trois-six.   solution du problème, tant cherché jusque-
                   Ainsi, le liquide condensé dans un com­  là, d’extraire du vin par une seule opéra­
                 partiment quelconque de l’appareil, était  tion, c’est-à-dire sans rectification ulté­
                 d’autant plus spiritueux qu’il s’éloignait da­  rieure, tout son alcool.
                 vantage de la chaudière, et si l’on avait placé   Edouard Adam put alors solliciter et ob­
                 des robinets au bas de chaque comparti­    tenir un brevet d’invention de quinze ans,
                 ment de la caisse, E, on aurait recueilli  qui lui fut accordé le 29 mai 1801 pour un
                 de l’esprit-de-vin plus ou moins privé d’eau,  procédé à l’aide duquel on retire du vin, par
                 et l’esprit-de-vin que l’on recevait au bout de  une seule chauffe, la totalité de l’alcool qu’il
                 l’appareil avait toujours le même degré de  contient.
                 force, et constituait de véritable trois-six,   11 s’agissait, après cela, de construire en
                 obtenu par une seule opération.            grand l’alambic industriel, car celui qui
                    C’était là, il faut en convenir, un impor­  avait fonctionné dans le laboratoire de la
                 tant résultat, et les personnes qui furent té­  Faculté de médecine de Montpellier, n’était
                 moins pour la première fois des effets du  qu’une ébauche, un dispositif préparatoire.
                 nouvel alambic, durent être frappées de  Aux deux caisses divisées en plusieurs com­
                 surprise et d’admiration.                  partiments, Edouard Adam substitua des
                    Telle fut l’impression que produisit l’ap­  vases séparés, en nombre égal aux compar­
                 pareil d’Edouard Adam, lorsque, le 29 mars  timents de son ancien appareil. Il avait re­
                  1801, l’inventeur le fit fonctionner dans une  connu que la forme rectangulaire de ses
                 réunion solennelle, qui eut lieu à la Faculté  deux caisses était vicieuse. En effet, le dépôt
                  de médecine de Montpellier, en présence du  de crème de tartre provenant de la con­
                  préfet de l’Hérault et d’une commission of­  centration du vin, se faisait dans les an­
                  ficielle nommée par ce magistrat, pour  gles, et ce tartre, se carbonisant par la
                  constater les effets du nouvel alambic. Plu­  chaleur, donnait un goût désagréable au
                  sieurs professeurs de la Faculté de méde­  produit obtenu après plusieurs opérations.
                  cine, des membres de l’Académie royale des  Pour éviter cet inconvénient, Edouard
                  sciences de Montpellier, des propriétaires et  Adam adopta pour ses vases la forme
                  des distillateurs, assistaient à cette expérience  ovoïde.
                  mémorable.                                  Une série de cinq à six œufs en cuivre
                    Le résultat de l’opération fut si remar­  remplaça donc les deux caisses primitives.
                  quable et si prompt que quelques distilla­  Au lieu de mettre de l’eau dans le serpentin
                  teurs prétendirent qu’Edouard Adam avait  terminal, Edouard Adam mit, dans ce ser­
                  préalablement mêlé de l’eau-de-vie au vin  pentin, du vin, qui s’introduisait ainsi, déjà
                  dont il s’était servi pour son expérience.  chaud dans la chaudière. Cette dernière
                    On ne pourrait faire un plus bel éloge de  disposition existait déjà, d’ailleurs, dans
                  cet appareil. Edouard Adam, tout fier de sa   toutes les distilleries du bas Languedoc, car
                  réussite, réclama une seconde expérience,   le chauffe-vin, imaginé, comme nous l’avons
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