Page 427 - Merveilles Industrie Tome 4
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L’ALCOOL ET LA DISTILLATION.                              421

         opéraient assez souvent avec ce singulier   auteurs ont ensuite donné comme de leur
         fourneau. On trouve encore dans les plan­  invention.
         ches de la grande Encyclopédie de Diderot   L’alcool que l’on obtenait par ces opéra­
         et d’Alembcrt (article Chimie') la figure de   tions, fut uniquement consacré, pendant le
         l'appareil que les chimistes du xvne et ceux   moyen âge, à l’usage médical. Ses propriétés,
         du xvine siècle employaient pour utiliser la   alors peu connues ou redoutées, en limitaient
         chaleur du fumier.                        l’emploi, et les alchimistes, qui seuls sa­
           Arnauld de Villeneuve, chimiste fran­   vaient l’obtenir, tenaient secrète la manière
         çais, contemporain et ami de Raymond  de le préparer. L’alcool était alors considéré
         Lulle, qui professait à l’Ecole de Montpel­
         lier, au xiii" siècle, a parle plus clairement
         encore que Raymond Lulle de la distilla­
         tion du vin.
           Dans son traité spécial sur les vins (De
         cmzs) Arnauld de Villeneuve enseigne à
         ses contemporains la préparation de l’al­
         cool, des huiles essentielles (térébenthine),
         des eaux spiritueuses, des vins médici­
         naux, etc.
           Dans le traité De vinis, dédié au roi de
         Sicile, Arnauld dit que certains rois fai­
         saient ajouter à leurs vins de l’eau-de-vie,
         à différentes doses, pour paraître posséder
         des crus de différentes qualités. L’eau-de-vie
         était donc un produit alors bien connu.
           La distillation et les appareils nécessaires
         à cette opération sont étudiés, dans le traité
         De vinis d’Arnauld de Villeneuve, avec beau­
         coup de développement. La distillation avait
         été, comme nous l’avons dit, mise en pra­
         tique par les anciens, mais elle était sin­
         gulièrement négligée lorsque Arnauld de
         Villeneuve en lit une opération courante   comme une véritable panacée. 11 avait la
         de la chimie et de la pharmacie.          vertu de rajeunir les vieillards et de prolon­
           Thaddée le Florentin (né en 1270) a     ger la vie. De là vint son nom aqua vitæ
         parlé également de l’esprit-de-vin.       (eau-de-vie).
           C’est Raymond Lulle qui donna le nom       Au xvne siècle, les jésuites d’Italie fabri­
         d’a/coo/ à l’esprit le plus concentré. Il trouva   quaient avec de l’eau-de-vie des médica­
         le moyen de le priver entièrement d’eau à   ments qu’ils distribuaient aux pauvres.
         l’aide de l’alcali fixe (carbonate de potasse).  C’est ce qui fit donner aux membres de cette
           Au xve siècle, l’alchimiste allemand Rasile   corporation le nom depadri dell acqua vita,
         Valentin obtint, à l’aide de la chaux vive,   « pères de l’eau-de-vie. »
         de l’alcool entièrement privé d’eau.         Jusqu’au xvi" siècle l’eau-de-vie resta,
            Dasile Valentin décrivit un appareil pour   à titre de médicament, confinée chez les
         la distillation du vin, appareil que d’autres   apothicaires; mais vers la fin du xyi' siècfi.,
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