Page 328 - Merveilles Industrie Tome 4
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               employée au mouillage, l’oxalate d’ammo­   On détermine aisément la présence du plomb
               niaque, employé comme réactif de la chaux,   dans la dissolution par ses réactifs ordi­
               ne pourrait qu’induire en erreur, en donnant  naires.
               un précipité plus ou moins abondant d’oxa-   Une falsification particulière du cidre
               lale de chaux. M. Chevallier a donné un  s’exécute à Paris.
               procédé pour constater avec précision ce     Souvent le produit vendu à Paris sous le
               genre de fraude. On décolore le cidre par le  nom de cidre n’est nullement préparé avec
               charbon animal et on évapore le liquide à  le jus de pommes. On le compose artificielle­
               siccité. On traite le résidu par l’alcool, qui  ment avec des pommes tapées ou séchées au
               dissout les acétates et les sépare des autres  four, que l’on fait macérer pendant quel­
               sels contenus dans le cidre. Par l’évapora­  ques jours dans un sirop de fécule mar­
               tion, l’alcool laisse l’acétate, dont on déter­  quant 4 à 5° à l’aréomètre. Quelle ressem­
               mine la base à l’aide des réactifs ordinaires.  blance peut-il exister entre le jus d’une
               Le chlorure de platine dénote la présence de  belle pomme, à l’odeur parfumée, et la dis­
               la potasse; l’oxalate d’ammoniaque, l’exis­  solution nauséabonde d’un sucre de fécule
               tence de la chaux. La soude serait caracté­  dans laquelle on a fait macérer une pomme
               risée par l’absence du précipité avec les deux  cuite? Le produit obtenu par un tel pro­
               premiers réactifs.                        cédé ne devrait pas plus porter le nom de
                 Une fraude plus dangereuse consiste à  cidre que l’on ne donne le nom de vin à lit
               saturer par l’oxyde de plomb les acides  boisson économique dans laquelle on fait en­
               libres du cidre.                          trer les raisins secs.
                 C’est au xviii' siècle que l’on paraît avoir   On lisait, il y a peu d’années, dans le
               employé en Normandie, pour la première  Journal de chimie médicale :
               fois, la litliarge (oxyde de plomb) pour faire
                                                           « La mauvaise qualité des produits que l’on vend
               disparaître l’acidité du cidre. On trouve
                                                         à Paris sous le nom de cidre, produits qui sont for­
               consignée dans les arrêts du parlement de   més les uns de cidre allongé d’eau, les autres de
               Rouen de 1775 et de 1784, la défense de   liqueurs fermentées préparées à l’aide du sucre de
                                                         glucose, etc., nous portent à prier ceux de nos con­
               désacidifier le cidre par le plomb.
                                                         frères qui habitent les départements où l’on fait
                 Les Annales d'hygiène ont donné, de nos   usage de cette boisson, à nous donner quelques dé­
               jours, le récit de faits du même genre (1).  tails sur cette liqueur, et notamment : 1° sur la
                                                         quantité d’alcool qui existe dans ces cidres ; 2“ sur
                 Le moyen de constater l’existence d’un sel
                                                         la quantité d’extrait qu’ils fournissent lorsqu’on les
               de plomb dans le cidre est fort simple. Il   fait évaporer, soit dans une étuve, soit à l’aide de la
               suffit de décolorer le liquide et de le traiter   vapeur d’eau. «
               par l’hydrogène sulfuré.
                                                            Quelques travaux utiles furent adressés au
                 Un moyen plus long, mais plus exact, con­  rédacteur du Journal de chimie médicale, en
               siste à évaporer le cidre à siccité, à l’inci­
                                                         réponse à cet appel.
               nérer et à traiter le résidu par l’acide azo­
               tique étendu d’eau. On évapore à siccité,   on avait introduit des sels de plomb, principalement de la
                                                         céruse, provenant de l’emploi de 125 grammes à'acétate
               pour chasser l’excès d’acide, et on reprend   de plomb et 12 a grammes de carbonate de potasse, par
               par l’eau distillée, qui dissout l’azotate formé.  pièce de 230 litres, dans le but d’effectuer une clarifica­
                                                         tion plus complète et plus prompte du cidre. Cette fal­
                                                         sification causa chez un grand nombre de consomma­
                 (1) A la suite de plusieurs déclarations faites, vers la fin   teurs, habitant différents quartiers de Paris, des douleurs
               de 1831, par des personnes qui avaient été gravement   aiguës vers la région abdominale. Ils présentèrent tous
               indisposées pour avoir bu du cidre, le préfet de police fit   les symptômes de la colique de plomb; deux succom­
               procéder, chez tous les fabricants et débitants de cidre de   bèrent à cette affection (Chevallier, Dictionnaire des
               Paris, à des vérifications, qui démontrèrent que dans une   altérations et falsifications des substances alimentaires,
               grande quantité de cette boisson livrée à la consommation   Ire partie, page 252, note 3).
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