Page 322 - Merveilles Industrie Tome 4
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                de le laisser environ vingt-quatre heures en  | on fait passer la liqueur dans d’autres fu-
                contact avec la pulpe. Celle-ci cède au li­ I tailles préalablement soufrées. On répète
                quide le principe colorant qu’elle ren­ | ces transvasements jusqu’à ce que le gaz
                ferme, et l’on a un produit d’une belle  acide carbonique ait cessé de se produire,
                couleur.                                  c’est-à-dire jusqu'à ce que la seconde fer­
                  On recueille dans un petit cuvier le jus   mentation, ou fermentation lente, soit ache­
                de pommes sortant du pressoir et on le    vée.
                dirige de là dans les tonneaux, pour qu’il   Le cidre préparé, à Jersey avec ces précau­
                y subisse la fermentation alcoolique. Lorsque  tions se conserve, plusieurs années, et il sup­
                chaque tonneau est à peu près rempli, on  porte les voyages par mer. Sa saveur est pi­
                recouvre la bonde d’un linge. Au bout de   quante et souvent plus agréable que celle
                quelques jours, la première fermentation,   des cidres de Normandie.
                ou fermentation tumultueuse, s’établit : il se   Quand la fermentation marche avec trop
                dégage beaucoup de gaz acide carbonique,  de lenteur, on cherche à l’activer, le cidre
                et le liquide en fermentation rejette une   n’ayant toutes ses qualités que lorsque cette
                écume. Il se forme un chapeau, qu’il est  fermentation a été complète. On emploie
                bon de ne pas rompre, pour empêcher  dans ce but plusieurs moyens, dont quel­
                l’action de l’air sur le liquide. 11 faut tenir  ques-uns seulement sont connus. L’addition
                constamment le tonneau rempli, parce que,   de la chaux, de la soude, des fleurs de tour­
                disent les paysans normands, le cidre ne se  nesol, peut déterminer dans un moût une
                conserve pas en baissière, c’est-à-dire dans  fermentation si rapide que, quelques jours
                un tonneau où se trouve du vide.          après, le cidre soit devenu potable.
                  11 importe également, si l’on veut obtenir   On ne saurait conseiller l’emploi de ces
                un bon produit, de soutirer le cidre à la  substances, car les sels que la soude et la
                fin de la fermentation tumultueuse, et de   chaux forment avec les acides du cidre,
                répéter ce soutirage un mois après. Cela  étant solubles, modifient la saveur et les
                fait, on introduit les cidres dans des ton­  propriétés de cette boisson. Ils peuvent
                neaux de la capacité de 7 à 8 hectolitres, et il  même modifier sa couleur. Le moyen le
                est propre à la vente ou à la consommation.  plus naturel, celui qui réussit le mieux,
                  Dans l’île de Jersey, où la fabrication du  pour activer la fermentation, consiste à
                cidre s’exécute d’une manière très-ration­  ajouter au liquide une certaine quantité
                nelle, on ne fait pas fermenter le jus de  de poiré qui, loin de présenter des incon­
                pommes dans des tonneaux, mais dans de  vénients, communique au cidre ses qualités
                larges cuves, placées dans des celliers dont  particulières.
                la température est de + 12 à -J- 15°. Par
                suite de ce large contact avec l’air, la fer­  Il arrive parfois que, malgré cette pré­
                mentation tumultueuse ne tarde pas à se  caution, le cidre fermente irrégulièrement.
                développer, et elle est terminée en une se­  Des effets si l’on remonte aux causes, on
                maine. Le liquide est alors soutiré dans  trouve moyen de les modifier. S’est-on servi
                des futailles bien nettoyées et soufrées.   de pommes vertes, qui ont donné un moût
                Une seconde fermentation s’établit. On  trop pauvre : le principe sucré fait défaut.
                laisse du vide dans ces futailles, et pour  Il faut alors ajouter au moût du sucre et un
                reconnaître si le dégagement d’acide car­  peu de levûre de bière. Ce procédé est re­
                bonique continue, on introduit par la  commandé par M. Girardin.
                bonde une bougie allumée : si elle s’éteint,   M. Dubuc, d’Evreux, conseille, pourrégu-
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