Page 320 - Merveilles Industrie Tome 4
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314 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
pulpe, on les met dans des cuviers, où on s’élèvent deux poutres jumelles, D,D, et
les abandonne pendant douze à vingt-quatre à leur gros bout deux autres jumelles sem
heures, en ayant soin de remuer cette pulpe blables. Le mouton s’élève et s’abaisse entre
plusieurs fois par jour, pour en empêcher la les quatre jumelles, et toujours à plomb
fermentation. La pulpe devient alors rou sur la brebis. On a une traverse que l’on
geâtre, ce qui cosimunique au cidre la cou met à la main sous le mouton dans les
leur ambrée que l’on recherche. deux jumelles du côté de la vis ; à l’aide
11 faut alors presser la pulpe des pommes de cette traverse on fait hausser et baisser
pour en extraire le jus. A cet effet, un homme en bascule le gros bout du mouton. Pour
la prend avec une pelle et la dépose sur le les jumelles de derrière on a des morceaux
tablier du pressoir, de manière à former une de bois qu’on appelle clefs; ces clefs ser
couchedeO"1,10 àOm,15 d’épaisseur. Surcette vent soit à supporter, soit à faire presser le
couche de pulpe, on étend un mince lit de mouton.
paille de seigle, ou bien un tissu de crin. La vis de bois qui sépare la brebis du
Surcette paille de seigle ou sur ce crin, on mouton doit, en s’abaissant, rapprocher les
étend une seconde couche de pulpe, que deux poutres et opérer la pression.
l’on recouvre comme la première, et ainsi de On établit entre les quatre jumelles sur la
suite. On forme ainsi un cube sur lequel brebis un fort plancher de bois, qu’on ap
on pose des madriers ou des billots. pelle le châssis d’émoi. Ce plancher a un re
On attend quelques heures avant d’opérer, bord de quatre pièces de bois, qu’on nomme
et l’on obtient par le simple égouttage le roseaux d'émoi et qui reçoit le jus de la
cidre dit de mère-goutte. On s'occupe ensuite pomme. Le liquide ne peut s’écouler que par
d’exercer la pression. un petit canal, qu’on appelle le beron, d’où
Le pressoir primitif de l’ancienne Nor il tombe dans une petite cuve.
mandie est un appareil encombrant et qui On a élevé perpendiculairement sur le
presse mal, car un hectolitre de pommes ne tablier du pressoir le marc des pommes, par
fournit en moyenne, parce mode de pressu lits de 15 centimètres d’épaisseur, séparés,
rage, que 35 litres de jus au lieu de 75 à 80 comme nous l’avons dit, par des couches
que l’on pourrait obtenir avec une presse hy de paille de seigle ou par des toiles de crin
draulique. Cependant, comme il est encore jusqu’à la hauteur de lm,50 environ. Le
très-répandu en Normandie, nous devons en marc ainsi disposé a la forme d’une pyra
donner la description. mide tronquée.
Ce pressoir est représenté dans la fi Au bas de la vis du pressoir est une roue
gure 195 (page 313), avec le tour à piler les de bois, R, placée horizontalement et qui
pommes. embrasse la vis. Des chevilles sont plantées
Il se compose d’un gros sommier de bois, sur la jante de cette roue. Des hommes
C, appelé la brebis, et qui n’a pas moins de prennent ces chevilles à la main, et en les
8 à 9 mètres de longueur, posé horizonta poussant font tourner la vis. Le mouton des
lement à peu de distance du sol, et d’un ar cend et presse le marc d’autant plus forte
bre, M, appelé le mouton, et élevé parallè ment que la poussée des hommes est plus
lement sur la brebis. Le mouton est soutenu, énergique.
au bout le moins gros, par une forte vis Quand le jus cesse de couler, on desserre
debois, dont l’autre extrémité se rend pareil la vis, on taille la motte carrément, avec
lement au bout le moins gros de la brebis. le couteau à pressoir, qui est un grand fer
Au milieu de la longueur de ces deux arbres recourbé et emmanché de bois; on charge