Page 265 - Merveilles Industrie Tome 4
P. 265

LE VIN.                                   259

         foulant les grappes. Le robinet de la cuve est  attend que les raisins muscats aient été ri­
         laissé ouvert : le moût qui s’écoule est reçu  dés par le soleil sur la souche, ou sur des
        dans des foudres, où il accomplit sa fer­  claies quand on les a coupés. Alors on les
        mentation. On presse chaque soir les raisins  foule entre des rouleaux, puis on porte la
        apportés de la vigne dans la journée. Il   vendange au pressoir. Le moût que l'on ob­
         faut que la masse soit pressée et déchargée   tient marque de 20 à 25° degrés au pèse-si­
        dans les vingt-quatre heures, pour que le   rop ; on le met en tonneaux, pour le faire
        vin ne se colore pas parles.pellicules du fruit.  fermenter, et on l'abandonne ensuite à lui-
          On ouille les foudres de vins rouges et de  même.
        vins blancs une quinzaine de jours après y   Parfois, à Rivesaltes, on ajoute du moût
        avoir mis le vin, mais on ne les bouche pas  cuit aux vins blancs, pour leur donner un
        encore. On ne place les bondes qu’aprèsles   plus fort degré de liqueur Mais on n’ajoute
        premiers froids, lorsque le vin s’est dé­  de moût cuit qu’aux vins de qualité mé­
        pouillé.                                  diocre.
          A Saint-Gilles (Gard), on vendangeait com­
                                                    « Pour le aiaccaiéo,dit M. Rendu, dans son Ampé-
        mencement d’octobre les raisins qui pro­
                                                  lographie française, on ne laisse pas les grappes se
        duisent l’excellent vin blanc connu sous le   désséchér sur la souche ou sur des claies; on les
        nom de Tokai-princesse. On égrappe ces rai­  cueille dès qu’elles sont mûres, on foule le raisin,
                                                  on le presse, on passe le jus au feu jusqu’à ce que
        sins, parce que, si on les laissait vingt-qua­
                                                  l’écume se montre; on retire, on laisse refroidir,
        tre heures dans une comporte sans les pres­  et on met en tonneaux avec un peu d’alcool. »
        ser, le vin prendrait un mauvais goût ; puis   « Pour le malvoisie, dit encore M. Rendu, on
        on foule avec les pieds, on soumet le marc à   cueille aussi le raisin à la maturité ; on a soin de
                                                  ne pas conprimer le raisin dans les comportes, on
        une énergique pression, absolument néces­  met tout de suite sous le pressoir, et le moût esl
        saire pour extraire le moût de ces raisins à   versé dans les futailles avec un peu d’alcool; on le
        demi désséchés par la maturité, et on verse   laisse alors fermenter. »
        le moût dans des futailles soufrées. On le   Dès que la fermentation s’est calmée, on
        laisse en repos deux ou trois jours, après
                                                  soutire et l’on ajoute encore un peu d’alcool.
        lesquels on le soutire.                     Pour avoir du malvoisie sec, on égrappe
          Les vins muscats de FrontignanetdeLunel   et on laisse fermenter pendant cinq ou six
        se fabriquent avec des soins particuliers,
                                                  jours avant de presser.
        qui font comprendre les qualités hors ligne
        de ces vins liquoreux. On laisse le raisin se   « Les vins de liqueur et les vins secs bien alcooli­
        dessécher presque entièrement sur la sou­  ques, peuvent être conservés longtemps en futailles,
                                                  dit M. Cazalis-AUut père. Ainsi logés, ils complètent
        che avant de le cueillir, pour qu'il se charge   mieux leur ferm enta lion et s’amélioren t. Il n’en est pas
        de la plus grande proportion possible de   de même des vins blancs légers et des vins rouges
        sucre ; on égrappe et on presse fortement   du Midi. Ceux-ci, par un trop long séjour dans les fu­
                                                  tailles, perdent de leurs qualités. 11 faut donc les
        les baies. Le moût reçu dans des tonneaux,   mettre en bouteilles dès que leur fermentation est
        sans aucun mélange avec la grappe, fer­   terminée. Cette époque est plus rapprochée pour les
        mente dans ces tonneaux, dont on tient la   vins peu alcooliques. On reconnaît que la fermenta­
                                                  tion d’un vin est terminée lorsqu’il ne devient pas
        bonde à demi fermée. Après des soutirages
                                                  louche pendant les grandes chaleurs, et qu’en dé­
        et des collages, et quand le vin ne forme   bouchant le tonneau, on n’entend plus le bruit que
        plus de dépôt, on le met en bouteilles.   ferait en s’échappant le gaz acide carbonique, si le
          Ces vins sucrés et très-alcooliques suppor­  vin travaillait encore. 11 y a une grande différence
                                                  entre un vin mis en bouteilles immédiatement après
        tent sans altération le transport et le temps.  que la fermentation est terminée, et celui que l’on
          A Rivesaltes (Pyrénées-Orientales), on   garde en futailles lorsqu’il n’a plus de chances de
   260   261   262   263   264   265   266   267   268   269   270