Page 253 - Merveilles Industrie Tome 4

LE VIN. 247

Le véritable avantage d’une cuve close, par où il s’échappe, et on le ferme par
c'est de mettre le chapeau à l’abri de l’air, les moyens appropriés.
de le laisser plonger dans le gaz acide carbo­ Les barriques ayant été soufflées, on perce
nique contenu entre le couvercle de la cuve leur bonde avec une tarière, et on les rince
et le marc, et d’éviter ainsi l’acidifica­ avec de l’eau tiède ou avec du vin. Ensuite
tion du marc. Mais l’absence de l’air a l’in­ on les dispose en lignes, dans le chai où elles
convénient de rendre la fermentation moins doivent rester.
active, et ce ralentissement de la fermen­ Pour remplir ces barriques, on ouvre le
tation est toujours un inconvénient. robinet qui ferme la cuve et on fait couler le
La clôture des cuves est donc une opéra­ vin dans un cuvier, d’environ 4 hectolitres de
tion qui ne justifie pas toutes les préoccupa­ capacité. Deux hommes puisent dans ce cu­
tions qu’elle inspire aux propriétaires du vier le vin, avec un seau de forme oblongue
Médoc. On s’est, en effet, ingénié de toutes qu’on appelle canne, et le versent dans des
laçons pour inventer des couvercles de cuve, comportes, que deux porteurs chargent sur
et depuis quelques années on en a fait de leurs épaules, pour aller le verser dans les
toutes sortes. Il serait inutile d’en donner la barriques, garnies d’avance d’un entonnoir
description. On peut fermer comme on le de bois. Deux hommes surveillent l’enton­
veut une cuve de vendange, pourvu qu’on noir et le changent de barrique à mesure
ne la ferme pas hermétiquement, car on la qu’une est remplie.
verrait éclater. Le vin qui coule au commencement de
Il est bien entendu que l’on ne doit fermer la décuvaison et celui qui provient de la fin
une cuve que lorsque la fermentation est de l’opération, sont toujours troubles. L’un
bien établie, c’est-à-dire deux ou trois jours et l’autre sont recueillis à part, pour être
après l’encuvage. mélangés, en petite proportion, avec le vin
Combien dure la cuvaison dans le Borde­ clair qui a coulé au milieu de la décu­
lais? Il n’y a pas sous ce rapport de règle vaison.
bien fixe. Elle dure, en général, de dix à La cuve ayant fourni tout le liquide qu’elle
quinze jours, mais l’expérience seule dé­ peut donner, il reste à exprimer le marc,
cide de ce point. pour en retirer le vin retenu dans sa masse.
Celui qui est chargé de prononcer sur cette Deux hommes descendent dans la cuve,
grave question est le maître de chai, c’est- après que l’on s’est assuré qu’elle ne con­
à-dire le chef d’atelier, le tonnelier de tient pas assez d’acide carbonique pour oc­
l’exploitation. casionner des accidents. Une chandelle al­
La décuvaison étant décidée et les barri­ lumée que l’on fait descendre dans la cuve,
ques étant achetées en nombre tel qu’elles renseigne suffisamment sur ce point. Si elle
répondent à la capacité des cuves, on s’as­ s’éteint, c’est que le gaz acide carbonique
sure du bon état de ces barriques. Pour cela, existe en proportion qui serait dangereuse.
on les perce d’un petit trou au point que la On chasse alors ce gaz irrespirable, en agi­
bonde devra occuper. Le maître de chai tant l’atmosphère de la cuve avec des bran­
souffle par ce trou, et au moyen de quelques ches d’arbres feuillues. Alors, les hommes
aspirations violentes, il condense de l’air retirent, avec des pelles, le marc, qui est jeté
dans la barrique. Si l’air ne sort par aucune dans des comportes et disposé sur la presse.
ouverture du bois, la barrique ne perdra L& presse à marc employée dans le Bor­
pas le vin. Si, au contraire, l’air se dégage, delais ressemble à celle de la Bourgogne.
avec un léger murmure, on cherche le point C’est une cage circulaire de bois, munie