Page 130 - Merveilles Industrie Tome 4

124 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.

que des additions de substances étrangères, L’analyse chimique prononcerait avec une
mais elles n’en portent pas moins dommage exactitude rigoureuse sur la composition
aux intérêts de l’acheteur, qui paye le prix d’un lait suspect, mais ce moyen est trop
d’un aliment dont il ne reçoit ni la qualité compliqué et trop long. On a donc imaginé
ni la quantité qu’il a payées. des instruments spéciaux pour reconnaître,
On croit et l’on répète généralement, que sans recourir à l’analyse chimique, si le lait
les marchands, pour rendre au lait l’aspect a subi les deux genres d’altération que
et la densité que lui fait perdre la soustrac­ nous venons de signaler.
tion de la crème, et dissimuler la saveur Parmi ces instruments, le plus employé est
fade et plate que lui communique une trop le lacto-densimètre de Quévenne. On donne
forte addition d’eau, ajoutent au lait un ce nom à un aréomètre, qui, plongé dans le
grand nombre de substances étrangères. On lait, indique, par la quantité dont il s’en­
a cité comme substances adultérantes que fonce, et par la lecture d’une échelle gra­
les marchands ajouteraient au lait étendu duée pour cet usage, la densité du lait.
d’eau : l’amidon, les farines, le glucose, la Quévenne a constaté, par des expériences
gomme, la gélatine et même des matières directes, que la densité du lait de vache
animales, telles que la cervelle de mouton. pur, à la température de -j- 15°, varie entre
On croit encore que les marchands ajou­ 1,029 et 1,033, c’est-à-dire que le poids de
tent quelquefois du blanc d’œuf, pour ren­ 1 centimètre cube de lait pur non crémé,
dre au lait écrémé la propriété de mousser varie entre 1er ,029 et 1gr,033, ou que le poids
par l’agitation, ainsi que le fait le lait pur. du litre entier est de 1 kilogramme 29 gram­
Hâtons-nous de dire que ces additions sont mes et 1 kilogramme 33 grammes ; enfin
fort rares. Les seules matières que les mar­ que la densité du lait écrémé, après un
chands ajoutent au lait, et encore fort ex­ repos de vingt-quatre heures, varie entre
ceptionnellement, sont du jaune d’œuf ou 1,0325 et 1,0365 ; c’est-à-dire que le
du caramel, pour rendre au lait écrémé et poids du litre de lait écrémé varie entre
étendu d’eau sa teinte naturelle, et masquer 1 kilogramme 32 grammes 5 décigram-
la teinte bleuâtre qu’il prend quand il a été mes et 1 kilogramme 36 grammes 5 déci-
écrémé. grammes.
Comme il faut de très-faibles quantités des Le lait écrémé est donc, en général, plus
substances que nous venons d’indiquer, pour léger que le lait non écrémé, sauf toutefois
produire l’effet cherché, le fraudeur peut les cas où le lait non écrémé atteint sa plus
trouver quelque avantage à les employer. o-rande densité. On voit que dans ces cir­
Disons seulement que la falsification du lait constances il peut y avoir incertitude sur la
par des cervelles d’animaux délayées et tritu­ limite de ces deux densités, et que la limite
rées dans de l’eau, est de pure invention. Les supérieure de l’une peut coïncider avec la
falsifications du lait se réduisent, en réalité, limite inférieure de l’autre. En d’autres ter­
à la soustraction de la crème du lait aban­ mes, le lait avec sa crème peut quelquefois
donné au repos, et à une addition d’eau, ces devenir aussi lourd que le lait écrémé. Les
deux moyens étant employés isolément ou indications tirées de la densité peuvent donc
simultanément. être parfois incertaines et inspirer moins de
Reconnaître les falsifications d’un lait, c’est confiance pour les laits de densités moyennes
donc chercher à constater si le lait a subi que pour ceux qui s’en écartent.
une soustraction de crème ou une addition Bien plus, le falsificateur qui serait assuré
d’eau. devoir apprécier son lait uniquement d’après