Page 124 - Merveilles Industrie Tome 4
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                  enivrante à laquelle on donne le nom de  Yakoutes, et autres peuplades nomades du
                  Koumys. Nous avons déjà donné (page 114)   nord de l’Asie.
                  l’explication théorique de la production d’un   En le soumettant à la distillation, on en
                  liquide alcoolique avec le lait. La fermen­  retire une véritable eau-de-vie, qui, après
                  tation s’opère, avons-nous dit, aux dépens de  sa rectification , s’appelle Araka, Arki et
                  la lactine qui est transformée en glucose.   Arza.
                  C’est la caséine qui contribue au développe­  Le koumys est aujourd’hui employé dans
                  ment delalevûre lactique, le véritable agent  la thérapeutique. Un établissement a été
                  de cette fermentation.                     créé en Russie, pour fabriquer le koumys
                     La fermentation lactique est, en effet, dé­  destiné à l’usage médical, et ses produits sont
                  terminée par la levûre lactique, découverte  exportés en divers pays de l’Europe, parti­
                  par M. Pasteur, et qui se compose de globules  culièrement en Allemagne, en Italie et en
                  très-courts. Sous l’influence de cette levûre,   France.
                  en présence du caséum, substance très-azo­   Le docteur Biel, de Saint-Pétersbourg, a
                  tée, la lactine donne naissance à de l’acide  publié en 1876, dans le Bulletin thérapeu­
                  lactique et à du glucose, et c’est ce produit  tique, des Recherches sur le koumys et sur
                  qui subit la fermentation alcoolique. Ainsi  les modifications qui s’opèrent dans le mou­
                  s’explique ce phénomène, qui a été long­   vement nutritif pendant son emploi, qui sont
                  temps fort embarrassant, à savoir, la produc­  le résumé des observations qu’il a faites dans
                  tion d’un liquide alcoolique dans un liquide  l’établissement pour la fabrication du kou­
                  dépourvu de sucre, c’est-à-dire dans du lait.  mys fondé par le docteur Stahlberg et di­
                     Les Tartares préparent le koumys de di­  rigé par le docteur Ebermann.
                  verses manières. Quelquefois ils détermi­    Ce vaste établissement est situé,dit le doc­
                  nent la fermentation en ajoutant au lait qui  teur Biel, à quelques milles de Saint-Péters­
                  a été réservé pour cet usage, du lait aigre,  bourg. Vingt juments, amenées des steppes
                  ou de la pâte aigrie de farine d’orge ou d’a­  méridionales de la Russie, y fournissent le
                  voine. Le plus souvent ils versent le lait  lait nécessaire à la fabrication du koumys.î
                  dans des espèces d’outres en peau de cheval  Ces animaux se trouvent dans les meilleures
                  non tannée, mais fortement durcie par la   conditions possibles, puisqu’ils passent la
                  fumée. Ces outres ont pour base un disque  plus grande partie de l’année en pleine li­
                   de peau de cheval constitué par trois  berté. Quand le lait vient d’être tiré, on le
                  pièces du même cuir. C’est dans ce récipient  mêle à une quantité de koumys, déjà préparé,
                  qu’on verse, jusqu’aux trois quarts environ  égale au dixième de son poids ; puis on le
                   de sa hauteur, le lait qu’il faut faire fer­  verse dans un vase en bois analogue à celui
                  menter. On le ferme alors au moyen d’une   dont on se sert pour la fabrication du beurre,
                   courroie de même matière ; on agite chaque   et là on l’agite de temps en temps, avec une
                  jour à plusieurs reprises, on ouvre ; on agite  tige en bois destinée à cet usage. Au bout de-
                   de nouveau, et lorsque l’acidité, parvenue à  quelques heures, le liquide est renfermé
                   son plus haut degré, commence à diminuer,   dans des bouteilles closes avec des bouchons
                   on décante la liqueur, en laissant au fond  de liège et entourées d’un fil de fer, puis
                   de l’outre le magma qui s’est déposé. Alors  les bouteilles sont déposées dans une cave
                   on enferme le liquide dans d’autres outres,   très-fraîche. Là, la fermentation se déve­
                   pour le conserver.                        loppe peu à peu, et l’acide carbonique qui en
                     Le koumys remplace le vin chez les      résulte est soumis, dans les bouteilles, à une
                   Tartares, les Baskirs, les Kalmoucks, les   forte pression.
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