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6                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.

                 une plus grande échelle, cl recueillir le pro­  « Nous laissûmes, écrit Lavoisier, brûler les airs
                                                           jusqu’à ce que nous eussions épuisé la provision que
                 duit qui avait dû se former.
                                                           nous en avions faite; dès les premiers instants, nous
                   Cette belle et décisive expérience fut   vîmes les parois de la cloche s’obscurcir et se cou­
                 faite le 24 juin 1783, avec le concours de   vrir de vapeurs; bientôt, ces vapeurs se rassem­
                                                           blèrent en gouttes et ruisselèrent de toutes parts sur
                 Laplace. On fit brûler du gaz hydrogène,
                                                           le mercure, et en quinze ou vingt minutes sa sur­
                 au moyen de l’oxygène pur, en opérant sur
                                                           face s’en trouva couverte. »
                 une cloche de verre posée sur du mercure.
                 Cette cloche était percée, à sa partie supé­  Il était donc certain que l’eau était le ré­
                 rieure, d’une ouverture fermée par un bou­  sultat de la combustion du gaz hydrogène
                 chon de cuivre, qui donnait passage à deux   par l’oxygène pur. Pour recueillir cette eau
                 tubes munis de robinets, communiquant     et l’examiner, Lavoisier et Laplace n’eurent
                l’un avec un réservoir de gaz oxygène, l’au­  qu’à passer une assiette sous la cloche sans
                tre avec un réservoir de gaz inflammable.   retirer cette cloche du mercure, et à verser
                On commença par allumer l’hydrogène dans   ensuite l’eau et le mercure dans un enton­
                 le flacon, puis on le reboucha avec le bou­  noir de verre ; en laissant, après cela, couler
                chon de cuivre percé de deux tuyaux, et    le mercure, l’eau se trouva réunie dans le
                l’on fit arriver les deux gaz en réglant leur  tube de l’entonnoir.
                                                             L’expérience faite le 24 juin 1783, par La­
                                                           voisier et Laplace, avait eu pour témoins
                                                           Leroy, Vaudermende et plusieurs autres
                                                           académiciens, ainsi que le secrétaire de la So­
                                                           ciété royale de Londres, sir Charles Blagden.
                                                           Lavoisier et Laplace obtinrent 19 grammes
                                                           17 centigrammes d’eau.
                                                             Cette eau, soumise à toutes les épreuves
                                                           que l’on put imaginer, parut aussi pure que
                                                           l’eau distillée. Elle ne rougissait nullement
                                                           la teinture de tournesol; elle ne contenait
                                                           donc pas d’acide. Elle ne verdissait pas le
                                                         ! sirop de violettes; elle ne contenait donc pas
                                                           d’alcali. Elle ne précipitait pas l’eau de
                                                           chaux; elle ne contenait donc pas de gaz
                                                           carbonique; enfin, par tous les réactifs con­
                                                           nus, on ne put y découvrir le moindre in­
                                                           dice de mélange.
                                                             Cette expérience fut communiquée, dès le
                                                           lendemain, à l’Académie :


                                                            «Nous ne balançâmes pas à en conclure, écrit
                              Fig. 4. — Monge.
                                                          Lavoisier, que l'eau n’est point une substance simple
                                                          et qu’elle est composée, poids pour poids, d’air in­
                écoulement d’après le volume de la flamme   flammable et d’air vital.
                brûlant à l’intérieur du flacon. Il suffisait,   « Nous ignorions alors que M. Monge s’occupât du
                pour régler l’arrivée des deux gaz, de fermer   môme objet, et nous ne l’apprîmes que quelques
                                                          jours après, par une lettre qu’il adressa à Van der
                plus ou moins le robinet placé sur le trajet
                                                          Monde et que ce dernier lut à l’Académie ; il y ren­
                du tube adducteur de l’un ou de l’autre gaz  dait compte d’une expérience du môme genre et qui
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