Page 67 - Les fables de Lafontaine
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INTRODUCTION 63
D’où l’on déduit que l’autour est emporté par l’Oiseleur ; mais
l’auteur ne le dit pas. Il en est de même dans la longue fable VII, 1,
les Animaux malades de la peste, l’auteur se contentant de déclarer,
pour conclure : On le lui fit bien voir (v. 62) ; de même encore,
dans XII, 5, 22, la conclusion s’exprime en trois mots : « il tint
parole ».
Parfois, la brièveté de la conclusion fait une antithèse frap
pante avec tout ce qui précède. Ainsi, dans VII, 11, l’un des
héros se donne mille tracas pour chercher la Fortune et c’est le
sujet de 84 vers. Quand, enfin, il revient chez lui, ayant renoncé
à la Fortune :
Il la trouve assise à la porte
De son ami, plongé dans un profond sommeil. (86-87.)
La longue fable qui est double, VIII, 18, se termine par quatre
monosyllabes : le Grec le crut (54).
Dans I, 19, la brièveté de la conclusion souligne ironiquement
le sot bavardage du pédant :
Ayant tout dit, il mit l’enfant à bord. (18.)
Parfois, la brièveté de la conclusion coupe brusquement le fil
de la narration, et l’on ne sait ce que deviennent les personnages :
Ayant parlé de cette sorte,
Le nouveau saint ferma sa porte. (VII, 3, 30-31.)
Cette porte qui claque au nez du lecteur, c’est le dernier trait
et non le moins expressif du caractère du saint.
De même, le geste final du Savetier (VIII, 2) :
Rendez-moi, lui dit-il, mes chansons et mon somme
Et reprenez vos cents écus,
exprime mieux l’idée directrice que ne pourrait le faire la plus
explicite morale.
La brusquerie de la conclusion ne fait que souligner la rapidité
de l’action, dans VIII, 15 :
Mais le Chat, sortant de sa cage,
Lui fit voir, en moins d’un instant,
Qu’un rat n’est pas un éléphant.
Même procédé dans X, 1, 82-83 et dans XII, 2, 30.
h) L’épilogue. Un procédé tout juste inverse de la conclu
sion brusquée consiste à prolonger la fable, après le récit, en
une sorte de causerie familière d’un tour souvent personnel.
LES FABLES DE LA FONTAINE. 3