Page 66 - Les fables de Lafontaine
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62         LES FABLES DE LA FONTAINE

                    On mit près du but les enjeux,
                    Savoir quoi, ce n’est pas l’affaire
                    Ni de quel juge l’on convint. (VI, io, 11-12.)
          d)  Transition. Le ton de la conversation, surtout dans les
        fables variées (n° 20), comporte souvent des digressions. La Fon­
        taine les souligne par les transitions qui marquent le retour à
        l’idée directrice. C’est ainsi que, à la fin de IX, 7, il fait une cri­
        tique de la fable qu’il vient de conter, puis revient à discourir de
        la métempsychose par la transition suivante, vraiment dénuée
        d’artifice :
              Revenons, s’il se peut, à la métempsychose (v. 60).
         e)  Mythologie. La poésie galante, mondaine, pédagogique, use
        constamment, au XVIIe siècle, d’expressions, d’images et même
        de sujets empruntés à la mythologie, qu’on appelait alors la Fable.
        La Fontaine en fait un emploi constant, à croire que son dieu
        est Jupiter, avec tout l’Olympe à ses côtés. On trouvera l’expli­
        cation de ces expressions mythologiques au Lexique. Il suffit
        d’une promenade rapide à Versailles pour se convaincre que,
        à cette époque, la mythologie formait le décor plus ou moins
        allégorique de la vie mondaine. C’est un véritable langage à
        déchiffrer.
         /) Morale. La place traditionnelle de la morale, dans les
        fables anciennes, est à la fin, en guise de conclusion. La Fontaine
        suit parfois cette tradition, mais, plus souvent, il place sa morale
        en tête, comme une sorte de thèse à démontrer :
              La raison du plus fort est toujours la meilleure.
                 Nous l’allons montrer tout à l’heure. (I, io\
         D’autres fois, il encadre sa fable par deux morales, qui ne sont
        pas nécessairement identiques. Quelquefois, même, il se dispense
        d’exprimer sa morale, laissant au lecteur le soin de la déduire...,
        s’il y en a une.
         g) La conclusion est, en générale, brève. C’est un des pro­
       cédés les plus caractéristiques du conteur : il développe à son
       aise les péripéties et indique d’un mot la fin du drame :
              Il en prit aux uns comme aux autres :
              Maint oisillon se vit esclave retenu. (I, 8, 55-56.)
         Le fait même qui termine le récit peut-être sous-entendu :
              L’Oiseleur repartit : « Ce petit animal
                    T’en avait-il fait davantage? » (VI, 15.)
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