Page 60 - Les fables de Lafontaine
P. 60
S& LES FABLES DE LA FONTAINE
le pléonasme exprime l’étonnement naïf du rat, et fait antithèse
avec le mot case qui est à la rime du vers précédent. Dans XII,
20, 12 :
(La Nature) excessive à payer ses soins avec usure,
le pléonasme souligne la libéralité de la nature.
Comme on le voit, le pléonasme, chez La Fontaine, exprime
uniformément la force d’un sentiment ressenti soit par l’auteur,
soit par un de ses personnages. C’est une figure de sentiment.
g~) La prétérition consiste à déclarer qu’on ne parle pas d’une
chose, ce qui est souvent une façon de souligner cette chose-:
De raconter quel sort les avait assemblés
Quoique sous divers points tous quatre ils fussent nés,
C’est (= ce serait) un récit de longue haleine. (X, 15, 7'9-)
A) La répétition consiste à insister sur une expression en la
répétant purement et simplement. C’est le type même de la figure
de sentiment :
Le repos, le repos, trésor si précieux! (VII, 11, 17.)
Mes enfants, approchez
Approchez\ je suis sourd... (VII, 15, 39-40.)
La première répétition exprime le désir ardent ; la seconde
exprime la bonhomie hypocrite.
:) La réticence consiste à affecter de ne pas parler d’une
chose. La Fontaine en use assez souvent pour indiquer qu’il
ne veut pas se compromettre dans des affaires litigieuses. C’est
chez lui une affectation pleine de malice.
Ceci soit dit en passant. Je me tais. (VII, 7, 45.)
Mais ceci soit dit entre nous. (IX, 7, 47.)
Ces deux exemples sont mis en valeur par le fait qu’ils terminent
la fable. Dans XII, 1, 17 : « Je m’en tais » est une formule de
courtisan qui ne veut point discuter les secrets « des dieux ».
j) La syllepse consiste à faire l’accord selon la pensée et non
selon la grammaire :
S’étant pris, dis-je, aux branches de ce saule,
Par cet endroit passe un Maître d’école. (I, 19, 7-8.)