Page 492 - Les fables de Lafontaine
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49° FABLES. — LIVRE DOUZIÈME
— Quel combat ? » dit le Singe avec un front sévère.
L’Éléphant repartit : « Quoi! vous ne savez pas
Que le Rhinocéros me dispute le pas * ?
Qu’Éléphantide a guerre avecque * Rhinocère ?
Vous connaissez ces lieux, ils ont quelque renom. 30
— Vraiment, je suis ravi d’en apprendre le nom,
Repartit Maître Gille ; on ne s’entretient guère
De semblables sujets dans nos vastes lambris *. »
L’Éléphant, honteux et surpris,
Lui dit : « Et * parmi nous, que venez-vous donc faire ? 35
— Partager un brin d’herbe entre quelques fourmis.
Nous avons soin de tout. Et quant à votre affaire,
On n’en dit encor * rien dans le conseil * des dieux.
Les petits et les grands sont égaux à leurs yeux. »
Exercice complémentaire. — Imagintz que le Rat de VIII, 15,
apprend, dans les enfers, la déconvenue de l’Éléphant et fait ses
réflexions à ce sujet.
22. — UN FOU ET UN SAGE
Sources. — Phèdre ; Abstétnius.
Intérêt. — Fable ésopique, à développement bref et à morale
explicite.
A rapprocher de IX, 8 : le Fou qui vend la Sagesse.
Certain * Fou poursuivait à coups de pierre un sage *.
Le Sage se retourne et lui dit : « Mon ami,
C’est fort bien fait à toi ; reçois cet écu *-ci ;
Tu fatigues assez pour gagner davantage.
Toute peine, dit-on, est digne de loyer *. 5
Vois cet homme qui passe : il a de quoi payer ;
Adresse *-lui tes dons, ils auront leur salaire *. »
Amorcé par le gain, notre Fou s’en va faire
Même insulte à l’autre bourgeois *.
On ne le paya pas en argent cette fois x. 10
1. On le paya en coups de bâtons. Litote, 24, a.