Page 489 - Les fables de Lafontaine
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LE PHILOSOPHE SCYTHE 487
En a tant soupiré qu’enfin elle n’est plus. 5
Son fils se plaint d’étrange * sorte :
Il éclate * en cris superflus ;
Le père en rit ; sa femme est morte ;
Il a déjà d’autres amours
Que l’on croit qu’il1 battra toujours. 10
Il hante * la taverne, et souvent il s’enivre.
N’attendez rien de bon du peuple * ifhitateur,
Qu’il soit singe, ou qu’il fasse un livre.
La pire espèce, c’est l’auteur.
Exercice complémentaire. — Expliquez et, s’il y a lieu, critiquez
la morale de cette fable.
20. — LE PHILOSOPHE SCYTHE
Sources. — Aulu-Gelle, Nuits Attiques, XIX, 12 ; Gilbert
Cousin.
Intérêt. — Cette fable morale est un chef-d’œuvre du genre,
par la vérité parlante du symbole choisi et le naturel du développe
ment.
Un Philosophe austère, et né dans la Scythie *,
Se proposant de suivre * une plus douce vie,
Voyagea chez les Grecs1, et vit, en certains * lieux,
Un Sage * assez semblable au vieillard de Virgile2,
Homme égalant les rois, homme approchant des dieux, 5
Et, comme ces derniers, satisfait et tranquille.
Son bonheur consistait aux • beautés d’un jardin.
Le Scythe l’y trouva qui, la serpe à la main,
De ses arbres à fruit, retranchait l’inutile,
1. Double relatif, 29, i.
1. Ce philosophe scythe qui voyage en Grèce ressemble beaucoup
au célèbre Anacharsis, héros de Platon, de Plutarque et de Lucien, et
popularisé par le roman de l’Abbé Barthélemy : Voyages du jeune Ana
charsis (1788). — 2. Le vieillard du Galèse (Géorgiques, IV, 125-133),
jardinier heureux sur son domaine.