Page 48 - Les fables de Lafontaine
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44         LES FABLES DE LA FONTAINE

           n) L’énallage est une variété d’anacoluthe qui consiste à changer
         brusquement le temps des verbes :
               Les trompes et les cors font un tel tintamarre
                   Que le bonhomme est étonné.
                Le pis fut que l’on mit en piteux équipage
               Le pauvre potager. (IV, 4, 38-41.)
           Le passage brusque au passé fait succéder sans transition un
         tableau immobile au tumulte de l’action, dont il est le résultat
         définitif.
           L’énallage de VII, 9, 16-17 est Ie chef-d’œuvre du genre :
               Le porc à s’engraisser coûtera peu de son ;
               Il était, quand je l’eus, de grosseur raisonnable...
           Il peint admirablement la rapidité des anticipations dans l’ima­
         gination de Perrette.
           0) L’énumération consiste à énoncer successivement les divers
         éléments d’un objet :
            Le lait tombe : adieu veau, vache, cochon, couvée. (VII, g, 23.)
           Cette énumération est une récapitulation, dans l’ordre chrono­
         logique renversé, des illusions de Perrette. Tous les mots portent.
          />) L’euphémisme consiste à voiler sous une expression agréable
         des choses qui le sont moins. Dans VIII, 18, 9 :
               Eux trois voulaient moins de reconnaissance,
         le mot reconnaissance voile la véritable expression qui serait : paie­
        ment. De même, plus bas (v. 15), charger d’un message pour Maho­
        met, veut dire : assassiner ; là l’euphémisme se double d’ironie.
          L’euphémisme s’emploie très fréquemment pour les choses de
        la mort. Mourir devient alors : aller chez ses pères, faire le grand
        voyage, etc.
          <?) La figure étymologique consiste à lier deux mots de
        même radical :
                  (II) faisait sonner sa sonnette. (I, 4, 6.)
          La figure étymologique, doublée ici d’une allitération, fait un
        effet de pittoresque. Au contraire, dans l’exemple suivant, elle
        renforce l’antithèse de la pensée :
               Nous faire éviter des maux inévitables. (II, 13, 5.)
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