Page 348 - Les fables de Lafontaine
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344 FABLES. — LIVRE HUITIÈME
La Belette était près du trou.
Le Rat grimpe plus haut : il y voit le Hibou *.
Dangers de toutes parts. Le plus pressant l’emporte ;
Ronge-maille retourne au Chat, et fait en sorte
Qu’il détache un chaînon, puis un autre, et puis tant 40
Qu’il dégage enfin l’hypocrite.
L’homme paraît en cet instant.
Les nouveaux alliés prennent tous deux la fuite.
A quelque temps de là, notre Chat vit, de loin,
Son Rat, qui se tenait à l’erte * et sur ses gardes. 45
— « Ah! mon frère, dit-il, viens m’embrasser. Ton soin *
Me fait injure. Tu regardes
Comme ennemi ton allié.
Penses-tu que j’aie oublié
Qu’après Dieu, je te dois la vie ? 50
— Et moi, reprit le Rat, penses-tu que j’oublie
Ton naturel? aucun traité
Peut-il forcer un chat à la reconnaissance ?
S’assure *-t-on sur l’alliance
Qu’a faite la nécessité ? » 55
Exercice complémentaire. — « Les Mémoires du Rat ». Sup
posez que le héros de cette fable, de III, 18, le Chat et un vieux
Rat, et de VII, 3, le Rat qui s’est retiré du monde, soit le même Rat
qui rédige ses Mémoires dans son fromage, et tenez la plume à sa place
23. — LE TORRENT ET LA RIVIÈRE
Sources. — Abstémius ; Haudent ; Desmay.
Intérêt. — Chef-d’œuvre typique de narration pittoresque.
Avec grand bruit et grand fracas
Un Torrent tombait des montagnes ;
Tout fuyait devant lui, l’horreur suivait ses pas ;
Il faisait trembler les campagnes1.
1. Harmonie imitative, 23, t.