Page 289 - Les fables de Lafontaine
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LE CURÉ ET LE MORT 285
Quelque accident * fait-il que je rentre en moi-même ?
Je suis Gros-Jean * comme devant.
Exercice complémentaire. — Décrivez le retour de Perrette à
la maison : son attitude, sa démarche, ses réflexiohs.
10. — LE CURÉ ET LE MORT
Source. — La source de cette fable est dans l’actualité, comme
le montrent ces deux textes de Mmc de Sévigné, qui datent la
composition de la fable de février-mars 1672 :
(26 février 1672). « M. de Boufflers a tué un homme après sa
mort. Il' était dans sa bière et en carrosse ; on le menait à une
lieue de Boufflers pour l’enterrer ; son curé était avec le corps.
On verse ; la bière coupe le cou au pauvre curé. »
(9 mars 1672). « Voilà une petite fable de La Fontaine qu’il a
faite sur l’aventure du curé de M. de Boufflers, qui fut tué tout
roide en carrosse auprès de lui ; cette aventure est bizarre ; la
fable est jolie, mais ce n’est rien au prix de celles qui suivront. »
Intérêt. — Cette fable est un conte réaliste qui fait la réplique
en masculin, de la fable de Perrette. Le procédé est le même que
dans la Fille, réplique du Héron. Mais, de même que la Fille
était une fable inférieure au Héron, de même, ici, le Curé et le Mort
ne vaut pas l’inégalable Laitière. Cependant, La Fontaine s’est
amusé à des effets de comique macabre, et ses antithèses, ses péri
phrases, ses énumérations, ses allitérations ont un pittoresque
et une verve qui enchantaient Hippolyte Taine. Le personnage
de son curé s’inspire du Jean Chouart de Rabelais, ce qui explique
sa vulgarité passablement débridée.
Un mort s’en allait tristement
S’emparer de son dernier gîte.
Un Curé s’en allait gaiement
Enterrer ce mort au plus vite 1.
Notre défunt était en carrosse 2 porté, 5
Bien et dûment empaqueté
1. Antithèse, 23, g. —2. Voir la Lettre de Mrac de Sévigné du 26 février,
citée dans Source.