Page 233 - Les fables de Lafontaine
P. 233

LE LION S’EN ALLANT EN GUERRE         229

      Il advint qu’au Hibou Dieu donna géniture *,
      De façon qu’un beau soir, qu’il était en pâture2,
             Notre Aigle aperçut, d’aventure *,
             Dans les coins d’une roche dure
             Ou dans les trous d’une masure 3,       25
             (Je ne sais pas lequel des deux),
             De petits monstres fort hideux,
      Rechignés, un air triste, une voix de Mégère *.
      — « Ces enfants ne sont pas, dit l’Aigle, à notre * ami.
      Croquons-les. » Le galant * n’en fit * pas à demi. 30
      Ses repas ne sont point repas à la légère.
      Le Hibou, de retour, ne trouve que les pieds
      De ses chers nourrissons *, hélas! pour toute chose *.
      Il se plaint, et les dieux sont par lui suppliés
      De punir le brigand qui de son deuil * est cause. 35
      Quelqu’un * lui dit alors : « N’en accuse que toi,
             Ou, plutôt, la commune loi
             Qui veut qu’on trouve son semblable
             Beau, bien fait, et sur * tous aimable.
      Tu fis de tes enfants à l’Aigle ce portrait :   40
             En avaient-ils le moindre trait? »
        Exercice complémentaire. — Récrivez cette fable sous forme
      dialoguée, en plusieurs scènes.


          19.  — LE LION S’EN ALLANT EN GUERRE

        Sources. — Abstémius ; Haudent.
        Intérêt. — Fable politique. C’est en même temps un petit
      résumé du symbolisme animal propre aux fables, le trait caracté­
      ristique de chaque bête se transposant en caractère social humain.
      Le Lion, dans sa tête, avait * une entreprise.
      Il tint conseil * de guerre, envoya ses prévôts *,
             Fit avertir les animaux.
      Tous furent du dessein *, chacun selon sa guise *.
       2. Être en pâture : être en chasse. Il désigne l’Aigle, d’après le texte
      de Verdizotti. — 3. Remarquez la rime quintuplée, 27, g.
   228   229   230   231   232   233   234   235   236   237   238