Page 226 - Les fables de Lafontaine
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222 FABLES. — LIVRE CINQUIÈME
Sur le bord d’un puits très profond,
Dormait, étendu de son long,
Un Enfant, alors dans ses classes.
Tout est, aux écoliers, couchette et matelas.
Un honnête * homme, en pareil cas, 5
Aurait fait un saut de vingt brasses *.
Près de là, tout * heureusement,
La Fortune * passa, l’éveilla doucement,
Lui disant : « Mon mignon *, je vous sauve la vie.
Soyez une autre foi» plus sage *, je vous prie. 10
Si vous fussiez tombé, l’on s’en fût pris à moi.
Cependant, c’était votre faute.
Je vous demande, en bonne foi *,
Si cette imprudence si haute *
Provient de mon caprice. » Elle part à ces mots. 15
Pour moi, j’approuve son propos.
Il n’arrive rien dans le monde
Qu’il ne faille qu’1 elle en réponde *.
Nous la faisons de tous * écots *.
Elle est prise à garant * de toutes * aventures *. 20
Est-on sot, étourdi, prend-on mal ses mesures ?
On pense en être quitte en accusant son sort * ;
Bref, la Fortune a toujours tort.
Exercice complémentaire. — Quelles sont les idées modernes
qui ont remplacé Vidée antique de la Fortune?
12. — LES MÉDECINS
Sources. — Esope ; Haudent ; Meslier.
Intérêt. — Fable épigramme, vivement troussée. La Fontaine
apporte ici sa quote-part, assez bénigne, à l’immense littérature
qui raille les médecins. Cf. le Malade Imaginaire, l’Amour Méde
cin, etc., de Molière.
1. Double subordination, 29, i.