Page 217 - Les fables de Lafontaine
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LES OREILLES DU LIÈVRE           213
               Mettôns-Ie * en notre gibecière *. »    10
        Le pauvre carpillon lui dit en sa manière :
        —  « Que ferez-vous de moi ? je ne saurais * fournir
               Au plus qu’une demi-bouchée ;
               Laissez-moi carpe devenir :
               Je serai par vous repêchée.             15
        Quelque gros • partisan * m’achètera bien cher,
               Au lieu qu’il vous en faut chercher 3
               Peut-être encor * cent de ma taille
        Pour faire un plat ; quel plat! croyez-moi : rien qui vaille!
        —  Rien qui vaille ? eh bien soit ! repartit le Pêcheur ;  20
        Poisson, mon bel ami, qui faites le prêcheur,
        Vous irez dans la poêle, et, vous avez beau dire,
               Dès ce soir on vous fera frire. »
        Un Tiens vaut, ce • dit-on, mieux que deux Tu l’auras.
               L’un est sûr ; l’autre ne l’est pas.
         Exercice complémentaire. — Discutez la morale de cette fable.



                 4.  — LES OREILLES DU LIÈVRE

         Sources. — Faërne ; Sadi. La Fontaine change les personnages
        qui, dans les sources, sont le Lion et le Renard.
         Intérêt. — Fable satirique. L’idée directrice, non exprimée,
        est que les Inquisiteurs (traduisez : les accusateurs publics, nous
        dirions aujourd’hui : les procureurs de la république) sont gens
        de mauvaise foi, dont les innocents, surtout s’ils sont faibles, ont
        tout à craindre. Sur cette idée directrice La Fontaine construit
        un récit plein de mouvement.

        Un animal cornu blessa de quelques coups
               Le Lion qui, plein de courroux,
               Pour ne plus tomber * en la1 peine,
               Bannit des lieux de son domaine
         3. Cher (prononcez ché) et chercher : rimes normandes, 27, g.
         1. La peine, cette peine ; article démonstratif, 29, c.
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