Page 211 - Les fables de Lafontaine
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L’ALOUETTE ET SES PETITS 207
L’aube du jour arrive et, d’amis, point du tout!
L’Alouette à l’essor 3, le Maître s’en vient * faire
Sa ronde ainsi qu’à l’ordinaire.
— « Ces blés ne devraient pas, dit-il, être debout.
Nos amis ont grand tort, et tort 4 qui se repose * 45
Sur de tels paresseux, à servir ainsi lents.
Mon fils, allez chez nos parents
Les prier de la même chose. »
L’épouvante est au nid plus forte que jamais.
— « Il a dit ses parents, mère, c’est à cette heure... 50
— Non, mes enfants, dormez en paix!
Ne bougeons 5 de notre demeure. »
L’Alouette eut raison, car personne ne vint.
Pour la troisième fois, le Maître se souvint
De visiter ses blés. « Notre erreur est extrême, 55
Dit-il, de nous attendre * à d’autres gens que nous.
Il n’est * meilleur ami ni parent que soi-même.
Retenez bien cela, mon fils ; et savez-vous
Ce qu’il faut faire ? Il faut qu’avec notre famille *
Nous prenions dès demain chacun une faucille : 60
C’est là notre plus court *, et nous achèverons
Notre moisson quand nous pourrons. »
Dès lors que * ce dessein * fut su de l’Alouette :
— « C’est ce coup qu’il est bon de partir, mes enfants. »
Et les petits en même temps,
Voletants, se culebutants 6, 65
Délogèrent tous sans trompette *.
Exercice complémentaire. — Faites le tableau suivant : le
champ de blé au moment où le Maître cause avec son fils, tandis que
les petits de l'Alouette, au nid, l’écoutent en tremblant.
3. L’Alouette (étant) à l’essor... Cet essor de l’oiseau dans le soleil
levant est caractéristique de l’alouette. — 4. Et (a) tort (aussi celui)
qui se repose... — 5. Négation, 29, k. — 6. Orthographe habituelle
chez La Fontaine du verbe culbuter. Accord du participe présent, 29, p.