Page 185 - Les fables de Lafontaine
P. 185
L’ANE ET LE PETIT CHIEN
Il ne les faut jamais engager * dans vos guerres,
Ni les faire entrer sur vos terres.
Exercice complémentaire. — Dépeignez l'attitude et les pensées
du Jardinier, resté seul dans son jardin, après le départ de la chasse.
S. — L’ANE ET LE PETIT CHIEN
Sources. — Ésope ; Anonyme ; Corrozet ; Haudent.
Intérêt. — Au XVIIe siècle, l'art de plaire en société est presque
l’essentiel de l’art de faire fortune. Il fait, en tout cas, partie de
l’honnête homme. Qui n’est pas honnête homme est ridicule, et
c’est au XVIIe siècle que le ridicule tue en France. Mais comment
plaire ? en restant dans sa nature :
Chacun, pris dans son air, est agréable en soi.
Ce n’est que l’air d’autrui qui peut déplaire en moi.
La fable de La Fontaine illustre, par un exemple comique,
la vérité des sentences de Boileau.
Ne forçons point notre talent,
Nous ne ferions rien avec grâce.
Jamais un lourdaud, quoi qu’il fasse,
Ne saurait * passer pour galant *.
Peu de gens, que le Ciel chérit et gratifie *, 5
Ont le don d’agréer infus avec la viex.
C’est un point * qu’il leur faut * laisser
Et ne pas ressembler à l’Ane de la fable
Qui, pour se rendre plus aimable
Et plus cher à son Maître, alla le caresser. 10
— « Comment! disait-il en son âme2,
Ce Chien, parce qu’il est mignon *,
Vivra de pair à compagnon *
Avec Monsieur *, avec Madame,
Et j’aurai des coups de bâton! 15
1. Le don d’agréer : le don de plaire ; infus avec la vie : existant natu
rellement en eux, inné. — 2. En son âme : en lui-même.