Page 174 - Les fables de Lafontaine
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170 FABLES. — LIVRE TROISIÈME
Ne peut plus repasser, et croit s’être méprise;
Après avoir fait quelques tours :
— « C’est, dit-elle, l’endroit ; me voilà bien surprise * ;
J’ai passé par ici 3 depuis cinq ou six jours. » 15
Un Rat, qui la voyait en peine,
Lui dit : « Vous aviez lors * la panse un peu moins pleine.
Vous êtes maigre entrée, il faut maigre sortir.
Ce que je vous dis là, l’on le dit à bien d’autres 4.
Mais ne confondons point, par trop approfondir 5, 20
Leurs affaires avec les vôtres. »
Exercice complémentaire. — Imaginez la suite des aventures
de la Belette dans son grenier.
18. — LE CHAT ET UN VIEUX RAT
Sources. — Ésope; Phèdre; Faërne; Haudent ; Baudoin;
Meslier.
Intérêt. — Fable admirable de vie et de mouvement, traitée
en parodie de l’épopée, sur le mode héroï-comique dont la tradi
tion, très ancienne, part de la Batrachomyomachie, ou Combat
des Grenouilles etzdes Rats, attribuée à Homère, mais qui est de
cinq siècles postérieure au grand poète.
J’ai lu, chez un conteur de fables1
Qu’un second Rodilard *, l’Alexandre * des chats,
L’Attila, le fléau des rats * 2,
Rendait * ces derniers misérables *.
J’ai lu, dis-je, en certain auteur 3, 5
Que ce Chat exterminateur,
3. Par ici : par ce trou-ci. — 4. Bien d’autres : ces « autres » sont
les financiers qui passèrent devant les chambres de justice. — 5. Trop
» approfondir une question où l’on peut se compromettre et où La Fon
taine avait été, en effet, compromis par son amitié pour Fouquet.
1. Ce « conteur de fables » est sans doute Ésope traduit par Nevelet
avec un contresens gardé par La Fontaine. — 2. Attila se disait « le
fléau de Dieu », c’est-à-dire l’instrument de Dieu pour écraser les
hommes. Le fléau des rats est celui qui écrase les rats. — 3. Entrée
en matière à la fois familière et épique.