Page 147 - Les fables de Lafontaine
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TESTAMENT EXPLIQUÉ PAR ÉSOPE 143
Dit l’Ane, en se donnant tout l’honneur * de la chasse.
— Oui, reprit le Lion, c’est bravement * crié. 20
Si je ne connaissais ta personne et ta race,
J’en serais moi-même effrayé. »
L’Ane, s’il eût osé, se fût mis en colère,
Encor * qu’on le raillât avec juste raison :
Car qui pourrait souffrir un Ane fanfaron ? 25
Ce n’est pas là * leur 8 caractère.
Exercice complémentaire. — Faites le portrait comique des
diverses attitudes de l’Ane : 1. recevant les instructions du Lion ;
2. occupé à braire sous « sa ramée » ; 3. venant recevoir les compli
ments du Lion.
20. — TESTAMENT EXPLIQUÉ PAR ÉSOPE
Source. — Phèdre.
Intérêt. — Cette fable termine le livre II par un hommage
rendu à la sagesse d’Ésope, fondateur du genre. La Fontaine se
plaît à insister sur l’autorité du Phrygien, dont il a placé la bio
graphie légendaire en tête de son recueil et dont il se donne comme
un simple traducteur. L’attitude de La Fontaine s’explique en
partie par le souci de mettre la fable sous l’autorité des Anciens,
le genre étant tenu en très médiocre estime par la tradition clas
sique.
La fable 20 est une « histoire des plus gentilles » destinée à
mettre en lumière l’ingénieuse intelligence d’Ésope. L’auteur
s’applique à suivre toutes les péripéties du récit de manière à
faire valoir Ésope. La portée morale de l’anecdote, s’il y en a une,
est tout à fait négligée.
Si ce qu’on dit d’Ésope est vrai1,
C’était l’oracle * de la Grèce ;
Lui seul avait plus de sagesse
Que tout l’Aréopage *. En voici pour essai * 3
3. Leur renvoie à un âne, mais s’accorde avec l’idée du pluriel : les
ânes, impliquée par la pensée. Syllepse, 24, j.
1. Restriction justifiée ; tout ce qu’on raconte d’Ésope est, en effet,
légendaire.