Page 146 - Les fables de Lafontaine
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142 FABLES. — LIVRE DEUXIÈME
Et, fussiez-vous embâtonnés *,
Jamais vous n’en serez les maîtres :
Qu’on lui ferme la porte au nez,
Il reviendra par les fenêtres10.
Exercice complémentaire. — Essayez de recomposer cette fable
en faisant disparaître la dualité de l'intérêt qui se partage entre le
mari et la femme.
19. — LE LION ET L’ANE CHASSANT
Sources. — Ésope ; Phèdre ; Meslier.
Intérêt. — Tableautin plaisant, traité avec une aimable ironie,
à peu près dénué de morale et s’achevant en comédie.
Le roi des animaux1 se mit un jour en tête
De giboyer *. Il célébrait sa fête.
Le gibier du Lion, ce ne sont pas moineaux,
Mais beaux et bons sangliers 2, daims et cerfs bons et beaux.
Pour réussir dans cette affaire, 5
Il se servit du ministère *
De l’Ane à la voix de Stentor *.
L’Ane, à Messer * Lion, fit office * de cor.
Le Lion le posta *, le couvrit de ramée •,
Lui commanda de braire, assuré * qu’à ce son 10 .
Les moins intimidés fuiraient de leur maison *.
Leur troupe n’était pas encore accoutumée
A la tempête de sa voix ;
L’air en retentissait d’un bruit épouvantable ;
La frayeur saisissait les hôtes de ces bois. 15
Tous fuyaient, tous tombaient au * piège inévitable
Où les attendait le Lion.
■— « N’ai-je pas bien servi dans cette occasion ?
10. Signalons que le vers, devenu proverbe : Chassez le naturel, il
revient au galop, est de Destouches (1680-1754), dans sa comédie Le
Glorieux (III, sc. V).
1. Périphrase noble, 24, d. — 2. Deux syllabes, par synérèse, 27, f.