Page 143 - Les fables de Lafontaine
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LE PAON SE PLAIGNANT A JUNON 139
Tous les mangeurs * de gens ne sont pas grands seigneurs.
Où la guêpe a passé, le moucheron * demeure 6.
Exercice complémentaire. — Citez des exemples historiques
de « mangeurs de gens » victimes de leurs excessives ambitions.
17. — LE PAON SE PLAIGNANT A JUNON
Sources. — Phèdre ; Corrozet ; Haudent.
Intérêt. — Cette fable n’est pas des meilleures ; elle n’est ni
dramatique ni vraiment pittoresque et l’on y relèverait aisément
des gaucheries et des lourdeurs. L’idée directrice est exprimée
abstraitement dans les vers 19-20.
Le Paon se plaignait à Junon * :
— « Déesse, disait-il, ce n’est pas sans raison
Que je me plains, que je murmure :
Le chant1 dont vous m’avez fait don
Déplaît à toute la nature * ; 5
Au lieu qu’un rossignol, chétive * créature,
Forme des sons aussi doux qu’éclatants,
Est lui seul2 l’honneur * du printemps. »
Junon répondit, en colère :
— « Oiseau jaloux, et qui devrais te taire, 10
Est-ce à toi d’envier la voix du rossignol,
Toi que l’on voit porter à l’entour * de ton col *
Un arc-en-ciel nué 3 de cent sortes de soies,
Qui te panades *, qui déploies
Une si riche queue, et qui semble à nos yeux ■ 15
La boutique d’un lapidaire * ?
6. (Dans la toile d’araignée) où la guêpe a passé (en brisant les fils)
le moucheron demeure (pris).
1. Le paon pousse un cri glapissant. — 2. Est à lui seul. —
3. Nué : nuancé ; cent sortes de soies : teintes de la soie, dont les reflets
sont délicats.