Page 110 - Les fables de Lafontaine
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106 FABLES. — LIVRE PREMIER
Ce ne fut pas le pis ; car, pour rendre complète 50
La vengeance due au poète,
Une poutre cassa les jambes de l’athlète
Et renvoya les conviés
Pour la plupart estropiés.
La renommée * eut soin de publier l’affaire ; 55
Chacun cria miracle ; on doubla le salaire
Que méritaient les vers d’un homme aimé des dieux.
Il n’était fils de bonne mère 5
Qui, les payant à qui mieux mieux,
Pour ses ancêtres, n’en fît faire. 60
Je reviens à mon texte * et dis, premièrement,
Qu’on ne saurait * manquer * de louer largement
Les dieux * et leurs pareils ; de plus, que Melpomène *
Souvent sans déroger * trafique de sa peine ;
Enfin, qu’on doit tenir notre art en quelque prix *. 65
Les grands se font honneur * dès lors qu’ils nous font grâce *.
Jadis, l’Olympe * et le Parnasse *
Étaient frères et bons amis.
Exercice complémentaire. •— D’après la fable précédente, dites
quelle idée La Fontaine se fait de la fonction et de la condition du
poète. ' .
15. — LE MORT ET LE MALHEUREUX
16. — LA MORT ET LE BUCHERON
Sources. — Ésope ; Corrozet ; Haudent ; Meslier. Pour la
fable 15, La Fontaine a emprunté le mot de Mécène à Sénèque,
épître 101, reproduit par Montaigne (II, ch. 37). Voici le texte
du poème de Mécène :
Debilem facito manu,
Debilem pede, coxa,
Tuber adstrue gibberum,
Lubricos quate dentes :
Vita dum superest bene est.
5, Fils de bonne mère, expression de l’ancienne poésie : homme bien né.