Page 55 - Vincent_Delavouet
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nouveaux gisements. Aussi n’hésitai-je plus, lorsqu’ils me
proposèrent de me joindre à eux ; ce qui portait notre petite
troupe à huit hommes.
Je me débarrassai d’un seul bloc de mon restant de mar
chandises, et, après avoir mis à fonds commun mille dollars
chacun, nous achetâmes sur place les vêtements, vivres,
outils indispensables et nous embarquâmes à Seattle même,
avec notre cargaison, à destination de Dyea, qui se trouve
par 60° de latitude nord, où nous arrivâmes sans incident
après quatre jours et quatre nuits de traversée.
Ce fut à Dyea que commencèrent les difficultés. Il s’agis
sait de franchir des espaces désertiques, sans aucun chemin
tracé, et transporter tout notre matériel sur notre dos, car
il n’y avait à compter que sur soi-même. C’était le vide,
l’inconnu.
Une première étape de 11 kilomètres de montagne pour
atteindre les 4.000 mètres de sommet et redescendre ensuite
jusqu’à un lac « Benett »,qui devait nous permettre de fran
chir une deuxième étape d’une cinquantaine de kilomètres
sur le radeau que nous nous proposions de construire. Ces
11 kilomètres auraient été vivement franchis, si nous n’avions
eu à transporter près de 6.000 kilos de bagages.... sur notre
dos ! Pour commencer, nous chargeâmes chacun nos épaules
d’une quarantaine de kilos de marchandises et nous faisions
un seul voyage aller et retour par jour. Mais il fallait à tour de
rôle que l’un de nos compagnons demeurât au point de
départ et à l’arrivée pour surveiller nos bagages. Au bout de
trois ou quatre jours, deux de nos camarades, épouvantés du
travail gigantesque entrepris, nous abandonnèrent leur part
de marchandises et nous quittèrent définitivement, ce qui
compliqua singufièrement la besogne, ayant le même poids
à transporter et n’étant plus que six. Je n’insisterai donc
pas sur nos misères, qui ne faisaient que commencer. Nous
mîmes vingt-deux jours pour transporter au bord du lac
Benett notre stock de marchandises ! Puis, avec le bcis abon
dant dans le pays, nous construisîmes un grand radeau ;
nous chargeâmes tous nos colis sur le radeau et, un beau
matin, entreprîmes la traversée en longueur de ce lac qui