Page 50 - Vincent_Delavouet
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Français et de voyageur me fit ouvrir toutes grandes les
portes de cet établissement, où l’on me choya comme « l’En-
fant Prodigue ». Pendant quinze jours environ l’on fut aux
petits soins pour moi et il ne fut naturellement pas question
de payer le moindre écot. Voilà la véritable hospitalité !
Cette Mission, aidée d’une subvention du Gouvernement
de la Colombie anglaise, avait donc fondé, à cet endroit, sur
d’immenses terrains mis à sa disposition, un système
d’élevage d’animaux (bêtes à cornes et chevaux) qui pouvaient
à cette époque se monter à cinq mille têtes.
En outre, les quatre missionnaires avaient groupé une
dizaine d’hommes étrangers au pays, ayant un métier spé
cial : forgerons, menuisiers, selliers, cordonniers, etc., sans
compter d’autres spécialistes : boulangers, bouchers, jardi
niers, etc., qu’ils avaient su conserver par leur accueil
aimable et un traitement digne d’eux.
C’est ainsi qu’ils apprenaient aux Indiens de bonne
volonté, et gratuitement, les différents métiers qui pouvaient
leur être utiles, de même qu’ils instruisaient les jeunes
Indiens à l’école.
La langue en usage dans le pays était un mélange d’indien
et d’anglais, dénommé << kinoucle » et, en général, c’est dans
cette langue que les Pères de la mission se faisaient com
prendre d’eux.
J’ai dit plus haut que j’assistai à un mariage chrétien
d’indiens. C’est le prêtre, dans ces régions, qui fait fonctions
d’officier d’Etat-civil. Le rite est le même que dans nos
églises françaises, excepté la cérémonie du Calumet, qui
doit remplacer les signatures sur le livre de la sacristie.
Que l’on se figure une soixantaine d’invités, hommes et
femmes indiens et quelques enfants accroupis à la façon
d’un tailleur et fumant chacun une pipe garnie d’une herbe
odorante, que les Indiens connaissent. Ils forment le cercle
dont le missionnaire qui a présidé à la cérémonie est le
centre.
Dans l’allocution qu’il leur improvise et tout en fumant
lui aussi le Calumet de la’Paix, il leur rappelle quelques
leçons de morale ; qu’ils doivent s’aimer et s’entr’aider les
uns les autres, qu’il ne faut pas s’approprier le bien d’autrui,