Page 109 - Vincent_Delavouet
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          vers fin juin 1911, à l’un des voyages que je fis dans les
          environs.
            Arrivé un dimanche matin aux mines d’or de Thémenn,
          je me trouvai le lendemain matin, inconsciemment, devant
          la gare et pris un billet de retour pour Cobalt alors que rien
          ne m’y appelait, qu’une force invincible, indépendante de
          ma volonté.
            Après sept heures de chemin de fer, je me retrouvai, tou­
          jours poussé par cet instinct incompréhensible, devant chez
          moi, contemplant d’un air hébété les ruines fumantes de
          ce qui était, deux jours avant, l’habitation que j’avais
          quittée !
            Lorsque je repris mes esprits, je m’enquis de ma femme
          et de mon fils....  Dieu merci, ils étaient sains et saufs; ils
          étaient allés se réfugier dans un hôtel voisin.
            Lorsque je fus rassuré sur leur sort, j’eus des explications
          sur ce second incendie que nous subissions coup sur coup
          en si peu de temps. Cette fois, toute idée de malveillance
          devait être écartée; il fut, en effet, reconnu que le magasin
          contigu au mien était une blanchisserie tenue par un Chinois
          et que c’était dans le séchoir que le feu avait pris naissance
          et s’était étendu dans tout le pâté de maisons.
            Et ce fut miracle que ma femme échappa à ce sinistre;
          nous logions au rez-de-chaussée dans un magasin divisé en
          plusieurs pièces et séparé de la rue par une grande glace.
          C’est lorsque la fumée et les flammes envahirent notre domi­
          cile, que cet incendie fut aperçu par les passants, et les
          voisins, sachant qu’il y avait des locataires dans ce magasin,
           firent voler la glace en éclats et firent sauver ma femme et
           son enfant. Quelques meubles même furent déménagés
           dans la rue. Mais je n’étais pas assuré cette fois et perdis
           pour plus de quatre cents dollars de coutellerie neuve en
           dépôt sans compter la plus grande partie de notre mobilier
           et de nos objets d’habillement personnels. Ma femme s’était
           enfuie en chemise. A la suite de cette nouvelle panique, je
           me proposais de ne pas continuer mes tournées de colportage.
             Malgré la facilité avec laquelle les maisons flambaient,
           je me mis « marchand de maisons » à Cobalt.
             Je commençai par en acheter une, assez délabrée, mais
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