Page 107 - Vincent_Delavouet
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        que de se marier dans ces pays neufs, où la langue française est
        <en honneur et le Français très bien accueilli. Mais* des
        abus et des cas de polygamie furent constatés par la suite,
        et le clergé qui, là-bas, fait les fonctions d’état-civil, devint
        méfiant. En ce qui me concerne, je me trouvai dans un cas
        spécial.
          Si j’étais demeuré soit aux Etats-Unis, soit au Canada
        pendant plusieurs années sans discontinuer et dans la
        même ville, une enquête eût été facile pour constater mon
        -célibat.
          Mais, comme le lecteur peut , le vérifier lui-même, mon
        existence, jusqu’alors, avait été particulièrement errante et
        à part Butte-Montana, où. j’ai séjourné plus longtemps, ma
        vie était un peu celle d’un oiseau sur la branche.
          Je crus donc devoir m’ouvrir de ce cas spécial à un prêtre
        de la paroisse de ma future, à qui je racontai sincèrement
        mes aventures. Ce prêtre ne put que me présenter à l’arche­
        vêque de Québec, à qui je recommençai mon récit. Il faut
        croire que mon accent fut sincère puisque, après m’avoir
        fixé de ses yeux perçants, l’Archevêque consentit à faire
        publier mes bancs, sans autres papiers que ceux d’identité
        que je possédais sur moi.
          Donc ce fut, ainsi que nous l’avions projeté, fin janvier 1910
        que nous fûmes unis. C’est ensuite que je conduisis ma femme
        à Montréal et au magasin. Nous étions en pleine lune de
        miel, lorsqu’il nous arriva, quelques jours après, une aventure
        qui aurait pu être tragique.
          Heureusement que nous n’habitions pas la même maison
        que celle du magasin. Une nuit, nous fûmes prévenus que
        notre magasin flambait. Je sus, par la suite, que le feu s’était
        communiqué d’une façon excessivement rapide, et que ce
        n’était pas la première fois que le fèu prenait chez ce pro­
        priétaire, habitué sans doute à ces alertes, puisque je le vis*
        dans son magasin de plomberie, mitoyen avec le mien, tran­
        quillement attablé avec son fils à boire le wisky, aussitôt
        tout danger disparu.
          Aucune poursuite ne lui fut d’ailleurs, intentée, puisque
        aucune preuve ne fut relevée contre lui, mais le fait d’in-
        eendie volontaire est tellement fréquent que l’on peut
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