Page 103 - Vincent_Delavouet
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Chapitre XXXII
Epicerie — Epicière
1910.
Je me reposai deux mois et demi de mon voyage à Chicago-
C’est là où je me rendis acquéreur d’une machine inventée
tout récemment qui affûtait les lames de rasoirs de sûreté.
Comme j’avais l’intention par la suite de continuer non
seulement ma bijouterie, mais la coutellerie, qui m’avait
donné toute satisfaction -à Butte-Montana, cette ma
chine, à mon avis, devait être pour moi une source de
profits nouveaux. En achetant cette machine, il fut con
venu, avec la maison qui me la vendait, que je serais son
seul agent général à Buffalo, Etat de New-York. C’est
pourquoi je me dirigeai sur cette importante ville, d’alors
sept à huit cent mille habitants, avec l’intention de trouver
un magasin pour vendre de la coutellerie et exposer en bonne
place cette nouvelle invention.
Tout en cherchant dans le centre de la ville, j’avisai un
magasin d’épicerie excessivement bien placé, au carrefour
de quatre grandes voies sillonnées de tramways.
Je rentrai dans ce magasin et, après avoir attendu assez
longtemps que la foule des. acheteurs soit plus clairsemée r
j’exposai au patron l’objet de ma visite. Il consentit à me
céder la place de suite, mais à la seule condition que je lui
paye au comptant toute la marchandise qui garnissait sa
boutique. On mit à la porte les clients, on ferma les volets,
et, en une heure de temps, sans autres formalités que le
témoignage d’un forgeron voisin, je payai comptant et sans
marchander le prix qui me fut demandé.
Puis le magasin fut ouvert à nouveau et, soit curiosité,
soit besoin, jusqu’au soir, il ne désemplit pas de clients à
qi i je vendais cette épicerie, au petit bonheur, au jugé,
n’ayant jamais exercé ce métier.
Au moment de la fermeture dudit magasin, une dame se
présenta, insistant pour me parler. Je la reçus. Elle se pré
tendit la femme de mon vendeur, et me dit qu’elle avait