Page 676 - Les merveilles de l'industrie T1
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672                   MERVEILLES DE L INDUSTRIE.


            parée qu’il n’avait pas été pris dans les gre­  le Perche et la plus grande partie de la
            niers du roi (1) !                        Normandie, figuraient dans ce groupe. Le
              Sous Louis XIV, on arrêtait, chaque an­  chiffre de la vente obligée s’élevait annuel­
           née, en moyenne, 2,000 hommes, 1,800 fem­  lement à 760,000 quintaux, et le prix du
            mes et 6,500 enfants, pour crime de faux-   quintal à 62 francs. On y était taxé à neuf
           saunage, c’est-à-dire de contrebande de sel   livres de sel par tête.
            d’une province à l’autre. Sur ce nombre 300   2° Les pays de petite gabelle étaient ceux
            individus de tout âge étaient envoyés aux   qui ne payaient que le minimum de cet im­
            galères à perpétuité. On constata, du temps   pôt. Le Maçonnais, le Lyonnais, le Forez
            de Louis XVI, qu’il y avait encore au ba­  et Beaujolais, le Bugey, la Bresse, le pays
           gne 1,800 forçats condamnés comme faux-    de Doinbes, le Dauphiné, le Languedoc, la
           sauniers (2).                              Provence, le Roussillon, le Rouergue, le
              Ce qu’il y a d’étrange c’est que les charges   Gévaudan, quelques cantons de l’Auvergne,
            résultant de l’exploitation de l’impôt du sel   appartenaient à cette section. La consom­
            n’étaient pas également réparties dans toute   mation obligée ne pouvait être au-dessous
            la France. 11 y avait une inégalité choquante   de 640,000 quintaux; le prix du quintal
           dans les conditions faites à chaque province   était de 33 livres 10 sous, la consommation
           relativement aux gabelles. Au moment de    devait être de 11 et 12 livres par tête.
           leur annexion au royaume,un certain nombre   3° Les/jm/s rédimés étaient les provinces
           de provinces avaient stipulé, qu’elles ne se­  qui avaient acheté et payé l’exemption en­
           raient point assujetties à l’impôt du sel.   tière du droit. Elles avaient payé, sous
            D’autres, en récompense de leurs services   Henri II, 1,750,000 lix res pour leur entière
           militaires ou de leur attachement à la cause   libération de l’impôt de gabelle, mais elles
           nationale, en avaient été exemptées ; d’au­  n’en furent pas moins assujetties à une
           tres s’en étaient rachetées. Les contribuables   partie de cet impôt, au sixième à peu près
           étaient donc soumis, pour le même im­      du cens fixé pour les grandes gabelles. La
           pôt, à des conditions très-différentes, sui­  quantité imposée aux consommateurs était
           vant les lieux qu’ils habitaient. Quelques lo­  de 830,000 quintaux. Le prix du quintal
           calités payaient un impôt très-élevé, d’autres   variait de 10 à 12 francs. Les pays rédimés
           payaient très-peu, d’autres rien. Quelques   comprenaient le Poitou, l’Aunis, la Sain-
           provinces n’étaient point taxées pour leur   tonge, l’Angoumois, le Limousin, une
           consommation, et dans d’autres, chaque fa­  grande partie de l’Auvergne, le Périgord,
           mille était obligée de prendre au grenier   le Querci, la Guienne, les comtés de Foix,
           à sel une quantité de sel déterminée.      Bigorre et Comminges.
             On avait divisé la France pour la per­     4° Les pays de quart-bouillon étaient ceux
           ception de l’impôt du sel, en six sections,   qui avaient la faculté de s’approvisionner
           dont voici les noms et les privilèges.     par des sauneries particulières, où l’on fai­
              1° Les pays de grande gabelle étaient ceux   sait bouillir un sable imprégné d’eaux sali­
           qui supportaient le maximum de cet impôt.   nes, à la charge de verser, à leurs frais et
           L'Ile-de-France, l’Orléanais, le Maine, l’An­  gratuitement, dans les greniers du roi le
           jou, la Touraine, le Berry, le Bourbonnais,   quart du produit de leur fabrication. Ce ver­
           la Bourgogne, la Picardie, la Champagne,   sement en nature avait été depuis converti
                                                      en un droit pécuniaire équivalent. Le débit
             (I) Revue des deux Mondes, 1er janvier 1873, page 192,
           article de SI. Ch. Louandre, sur l’impôt du sel,  était d’environ 115,000 quintaux; le prix du
             (2) Ibid.                                quintal était de 10 livres. Ce droit n’apparte-
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