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                    animaux qui, autrefois, étaient perdues. Au­  Dans son ouvrage sur les Etats-Unis
                   jourd’hui, dans la seule ville de Chicago,   d'Amérique, M. Oscar Commettant a donné
                    dans les Etats-Unis d’Amérique, on tue et on   la description d’une usine située dans les
                    sale plus de 500,000 porcs et de 100,000bêtes   environs de la ville de Brooklyn (1) et dans
                    à cornes chaque année.                    laquelle on se sert exclusivement d’appareils
                      11 y a à Chicago, deux périodes pour les I  mécaniques pour égorger, dépecer et saler
                    salaisons, celle d’hiver et celle d’été. La sa­  les porcs. Dans cet établissement, qui offre
                    laison d’été a peu d’importance et n’est   une des plus singulières applications de la
                    guère destinée qu’à fournir aux pêcheurs de   mécanique, on abat et dépèce chaque jour
                    morue la provision de viande qui leur est   une centaine de ces animaux.
                    nécessaire pendant leur campagne dans les
                    parages de Terre-Neuve. Les salaisons d’hi­  « L’usine de M. Boviello, dit M. Oscar Commettant,
                                                              se compose de quatre grands corps de bâtiments
                   ver sont plus importantes. Elles commen­
                                                              rattachés tous par des ponts suspendus. Plus loin,
                    cent au mois de novembre, et durent tout  comme des plaines vivantes que va bientôt faucher
                                                              la dévorante machine, sont parqués d’innombrables
                                                              troupeaux de porcs appartenant à différents pro­
                                                              priétaires, qui les apportent à cette usine comme
                                                              on apporte du blé au moulin pour le moudre.
                                                               « A un signal du mécanicien en chef, on lève
                                                              une bascule qui communique avec l’entrée d’un pre­
                                                              mier compartiment de la machine appelée l’égor-
                                                              geoir, et l’opération de destruction commence. Les
                                                              cochons, très-serrés l’un contre l’autre, voyant une
                                                             issue, se précipitent dans ce corps de bâtiment jus­
                                                              qu’à un couloir étroit, où ils ne peuvent passer
                                                              qu’un à un. Arrêtés là un instant, ils ont le cou
                                                              traversé par d’énormes couteaux mus par la vapeur
                                                              comme tout le reste de la machine. Le cochon,
                                                             égorgé en moins d’une seconde, se trouve pris par
                                                             les pattes de derrière et traîné violemment par des
                                                             crampons qui le hissent jusqu’à une certaine hau­
                                                             teur. Là, il reste suspendu un instant et passe plus
                                                             loin sur un balancier mobile, sans cesse en mouve­
                                                             ment, qui plonge l’animal dans un puits de vapeur
                                                             et finit par l’étouffer en l’échaudant.
                                                               « Le cochon, un moment plongé dans le gouffre,
                                                             reparaît bientôt pour être saisi par de nouveaux
                                                             crampons qui le traînent dans la brosserie. Cette
                                                             brosserie cylindrique, munie de fortes brosses qui
                                                             agissent en sens contraire, saisit le cochon et lui
                                                             fait faire, en le brossant, de dix à quinze révolu­
                                                             tions dans une demi-minute. Ce laps de temps
                                                             suffit pour épiler l’animal et lui rendre la peau
                                                             blanche comme celle d’un jeune poulet. Après cette
                   l’hiver. On trouve aujourd’hui à Chicago   opération, il est encore saisi par des crampons qui
                                                             le transportent, par un mouvement brutal et symé­
                   d 'immenses usines dans lesquelles les porcs,
                                                             trique, dans un carré spécial, où il est fendu par le
                   amenés par troupeaux énormes, sont abat­  ventre depuis la queue jusqu’à l’extrémité du mu­
                   tus, et dépecés au moyen de procédés pure­  seau. Des ouvriers choisissent alors les bonnes par­
                                                             ties, qu’ils conservent, et jettent le reste dans une
                   ment mécaniques, puis salés et expédiés en
                   Europe. Plusieurs centaines de porcs, et
                                                               (1) Brooklyn est une ville séparée de New-York seulement
                   autant de bêtes à cornes sont ainsi dépecés,
                                                             par la rivière de l’Est. Elle compte lG,000 âmes, et peut
                   salés et embarillés en un jour.           être considérée comme un faubourg de New-York.
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