Page 600 - Les merveilles de l'industrie T1
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596                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


             y apportent de continuelles perturbations. ! vallesqui séparent la récolte de sel varient,
             Souvent le paludier est forcé de recueillir le   au plus fort de la campagne, depuis cinq à
             sel au bout de vingt-quatre heures, parce   six jours jusqu’à deux ou trois jours.
             que la pluie menace. Souvent aussi il est    Lorsqu’on n’est plus dans la période
             obligé de se lever au milieu de la nuit, pour   moyenne de la campagne, les cueillettes se
             porter le sel de la ladure au mulon, parce   font à des intervalles plus éloignés. C’est
             qu’une averse pourrait emporter cette ré­  ainsi qu’à Marennes on récolte le sel tous les
             colte. Sur le mulon le sel est encore exposé   trois jours au mois de juillet, tandis qu’au
             à la pluie, mais en masse un peu considé­  mois d’août on ne le tire que tous les quatre
             rable il résiste beaucoup mieux à l’action   ou cinq jours, et si la saunaison continue en
             dissolvante de l’eau du ciel.              septembre, on ne fait guère qu’une cueil­
                                                        lette par semaine.
               Outre le sel ordinaire, ou sel gris, dont   Dans la Vendée, à Saint-Gilles, on intro­
             nous venons de décrire la récolte, on obtient   duit l’eau sous une épaisseur de 0m,03 ou
             aussi sur les œillets, un sel plus fin et par­  0m,04, et on tire le sel tous les trois jours.
             faitement blanc, qu’on appelle sel fin ou sel   A Beauvoir, l’eau est introduite sous une
             blanc naturel. Ce sont tout simplement les   épaisseur de 0m,02 seulement et on tire le sel
             cristaux menus qui se forment à la surface   tous les deux ou trois jours.
             de l’eau, et qui y demeurent suspendus. On   Aux Sables-d’Olonne, la couche d’eau
             les enlève, en écrémant, pour ainsi dire,   amenée sur les tables n’a que 0“,02 et le sel
             l’œillet, au moyen d’une pelle en bois très-   est tiré tous les jours, quand le temps est fa­
             mince. On enlève ce sel blanc tous les jours,   vorable à la production.
             immédiatement avant l’introduction d’eau    A Noirmoutiers on tire également le sel
             nouvelle dans l’œillet.                   tous les jours.
               Le sel blanc se forme surtout abondam­
             ment quand, le beau temps et la récolte se   Un œillet ne peut pas fournir du sel indé­
             prolongeant, les eaux contenues dans l’œillet   finiment. il arrive un moment, vers le mois
             sont devenues très-denses. Le paludier ob­  de septembre, où l’on ne peut plus en récol­
             tient tout au plus 60 à 80 kilogrammes de   ter, malgré l’introduction d’eaux concen­
             sel blanc dans la campagne d’une année.   trées dans Vœillet.
                                                          C’est là le phénomène connu sous le nom
               La fabrication du sel dans l’Ouest pré­   échaudement des œillets. Il est évidemment
             sente, selon les localités, quelques variations   dû à la concentration indéfinie des eaux
             de détail, quant à l’épaisseur d’eau qui   mères.
             couvre les surfaces évaporatoires et les inter­  En effet, les eaux mères ne sont jamais
             valles de temps qui séparent la cueillette de   évacuées. Elles sont seulement rafraîchies
             sel. Nous dirons un mot de ces différences.  chaque jour, par l’introduction d’eau vierge
               Dans la Charente-Inférieure, l’épaisseur   empruntée à Yaderne. Au début de la cam­
             d’eau introduite dans les aires ou œillets varie   pagne, quand l’œillet ne contient encore
             de 0m,0o, environ à 0m,03, et les cueillettes   qu’une faible quantité d’eau mère, celle-ci
             s’effectuent à des intervalles de temps en   ne paraît pas exercer sur la cristallisation
             rapport avec cette épaisseur. Moins on in­  une influence défavorable. Les paludiers ont
             troduit d’eau, plus en général les cueillettes   observé, au contraire, que le premier sel
             sont rapprochées.                          formé dans un œillet qui commence à sau­
               Dans les mêmes marais salants, les inter-   ner et qui ne contient pas encore d’eau mère,
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