Page 484 - Les merveilles de l'industrie T1
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480                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


                     teur de la découverte de la soude factice,   chargea M. Dizé, son préparateur, de le suppléer
                                                               pour cet examen. Leblanc se mit aussitôt à l’œuvre
                     est aujourd’hui très-instructive et très-inté­
                                                               dans le laboratoire de Darcet, au Collège de France,
                     ressante à connaître.                     sous les yeux et avec la collaboration de M. Dizé. Il
                       Dans le début de ses travaux,opérant d’après   incinéra un mélange de trois parties de charbon pul­
                     l’idée de la Métherie, Leblanc se bornait à   vérisé avec une partie de sulfate de soude, jusqu’à
                                                               ce que le charbon fût entièrement brûlé ; mais ce
                     calciner un mélange de trois partiesde char­
                                                               produit n’était qu’un sulfure, et ne justifiait en au­
                     bon pulvérisé et d’une partie de sulfate de   cune manière l’opinion qu’il avait avancée. Il sou­
                     soude. Mais que pouvait-il obtenir en opérant   tint cependant qu’il avait obtenu de la soude par ce
                                                               procédé, et, pendant quinze jours, il exécuta un
                     ainsi ? Comme nous l’avons dit plus haut, un
                                                               très-grand nombre d’incinérations de sulfate de
                     simple sulfure de sodium. La soude se trou­  soude et de charbon, en variant les proportions du
                     vait donc convertie en un produit tout autre  mélange et les conditions de l’expérience; mais il
                                                               ne fut pas plus heureux.
                                                                 « Le procès-verbal des essais était rédigé avec la
                                                               plus grande exactitude par M. Dizé; il détruisait la
                                                               valeur du procédé de Leblanc. Darcet allait adresser
                                                               au duc d’Orléans un rapport défavorable; Leblanc,
                                                               soutenu par cette persévérance infatigable qui bien
                                                               souvent est le génie des découvertes, le pria de dif­
                                                               férer et de lui permettre de continuer ses recher­
                                                               ches avec l’assistance de M. Dizé.
                                                                 « Mais un autre obstacle allait l’arrêter encore,
                                                               de nouveaux essais devaient l’entraîner dans des
                                                               dépenses qui auraient été trop onéreuses pour lui.
                                                               Darcet leva cette difficulté en obtenant du duc d’Or­
                                                               léans qu’il en ferait les frais. Dès ce moment, un
                                                               plan d’expériences fut arrêté entre les deux colla­
                                                               borateurs, et ils se mirent à l’œuvre. »

                                                                 La formation du sulfure de sodium pendant
                                                               la calcination du sulfate de soude avec le char­
                                                               bon, était la réaction qu’il s’agissait d'empê­
                                                               cher. Pour y parvenir, il fallait déterminer
                                                               avec soin les proportions du sulfure formées
                                                               dans chaque produit, afin de comparer ces
                                                               produits entre eux et d’apprécier la valeur
                                                               relative des résultats de chaque expérience.
                                                               L'azotate de plomb, les acides, furent tour à
                    que celui qu'il importait de former.Ilfut bien­
                                                               tour employés comme moyens de dosage du
                    tôt conduit à modifier cette insuffisante mé­
                                                               sulfure de sodium. Enfin, Leblanc eut l’idée
                    thode.
                                                               de faire usage, dans le même but, d’un cou­
                      M. Félix Boudet, auteur d’une intéressante   rant d’acide carbonique dégagé du carbonate
                    Notice historique surDizé,le collaborateur de
                                                               de chaux. L’acide carbonique chassait le
                    Leblanc,raconte ainsi commentée dernier fut   soufre, à l’état d’acide sulfhydrique, et
                    amené à perfectionner ses premiers procédés :
                                                              transformait ainsi le sulfure en carbonate.
                      « Leblanc, nous dit M. Félix Boudet, fit des dé­  Cette élimination du soufre par l’acide
                    marches auprès du duc d’Orléans. Le prince l’accueil­  carbonique, et la formation du carbonate de
                    lit avec bienveillance, mais refusa de prendre aucun
                                                               soude, qu’il n’avait d’abord employée que
                    engagement avec lui avant que Darcet eût constaté
                    la valeur réelle de son procédé. Darcet était alors   comme moyen d’analyse dans le cours de
                    très-occupé d’un travail relatif aux monnaies; il   ses opérations, frappèrent vivement l’esprit
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