Page 482 - Les merveilles de l'industrie T1
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478                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.

                     lever dans notre pays l’industrie manufactu­  Le sel marin était indiqué, dans le pro­
                     rière. Le soufre que la Sicile nous refusait,   gramme de T Académie, comme la source à
                     fut extrait des pyrites de notre sol ; l’alun   laquelle il fallait s’adresser pour la solution
                     fut fabriqué avec les pyrites alumineuses;   du problème de la fabrication artificielle de
                     le salpêtre nécessaire à la fabrication de la   la soude. En effet, l’existence de la soude à
                     poudre, fut préparé, pour la première fois,   l’état de carbonate dans certains lacs salés
                     au moyen du lessivage des vieux plâtras, de   de l’Egypte, et l’emploi, pour préparer la
                     la terre des caves et des écuries ; enfin la   soude naturelle, des plantes qui végètent
                     soude fut fabriquée avec le sel marin puisé   sur le bord de la mer, démontraient que
                     sur notre littoral. Les nations qui avaient   la source véritable de cet alcali se trouvait
                     espéré anéantir le commerce et l’industrie de   dans l’eau de la mer, et signalaient ainsi le
                     la France, furent obligées, plus tard, d’em­  véritable et inépuisable réservoir auquel il
                     prunter, pour se soutenir elles-mêmes, les   fallait s’adresser pour en obtenir la matière
                     moyens nouveaux créés par le patriotisme   précieuse, objet de tant d’applications dans
                     et le génie de notre nation.              l’industrie.
                       De toutes les découvertes qui furent réa­  Remis pendant quatre années consécu­
                     lisées à cette époque, la fabrication de la   tives, le prix proposé par l’Académie ne fut
                     soude artificielle est de beaucoup la plus   pas décerné.
                     remarquable par ses immenses résultats       Cependant, dès l’année 1777, une ten­
                     économiques. Nous allons dire comment     tative avait été faite dans ce sens. Un bé­
                     elle s’accomplit.                         nédictin, le P. Malherbe, avait proposé, à
                                                                cette époque, de convertir d’abord le sel
                       Avant l’année 1792, la soude se préparait   marin en sulfate de soude et d’agir sur ce
                     exclusivement au moyen de la combustion    dernier sel pour le transformer en carbo­
                     de certains végétaux, et pour satisfaire aux   nate. A cet effet, le P. Malherbe faisait
                     besoins de plusieurs de ses industries, la   fondre le sulfate de soude avec du charbon
                     France, comme nous l’avons dit, payait alors   et du fer. Il se forme ainsi un composé de
                     à l’Espagne, qui lui fournissait les soudes   soufre, de sodium et de fer, qui se délite à
                     d’Alicante, de Carthagène et de Malaga, un   l’air, et donne du carbonate de soude quand
                     tribut annuel de 20 à 30 millions.        on le lessive.
                       Ce fâcheux état de choses avait depuis     Ce moyen, dont l’invention remonte
                     longtemps préoccupé le gouvernement de    comme on le voit, à une époque éloignée,
                     nos rois, qui désirait affranchir l’industrie   a été repris de nos jours. Nous verrons plus
                     nationale du tribut onéreux qu’elle payait   loin qu’un chimiste habile, M. Kopp, a ex­
                     depuis des siècles à l’étranger. L’ancienne   ploité à Manchester un procédé pour la fa­
                     Académie des sciences mit en concours un   brication du carbonate de soude au moyen
                     prix de 2,400 francs, que le gouvernement   du fer et du charbon.
                     l’avait chargée de décerner à l’auteur du    Dans le procédé du P. Malherbe, on agit
                     meilleur travail sur la fabrication de la   avec le sulfate de soude. C’est le même
                     soude. Il s’agissait de soustraire l’industrie   produit que le savant rédacteur du Journal
                     du blanchiment, celle du verre et celle des   de physique, de la Métherie, proposait, en
                     savons, aux effets fâcheux résultant du ren­  1789, d’employer pour obtenir la soude ar­
                     chérissement des potasses, et de la hausse,   tificielle. De' la Métherie voulait que l’on
                     toujours croissante, des soudeS naturelles   décomposât le sulfate de soude par le char­
                     empruntées â l’Espagne.                   bon. 11 pensait que, par l’action du char­
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