Page 478 - Les merveilles de l'industrie T1
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471                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE


                    des de varech les iodures et. les bromures.  Passons au natron des anciens et à celui
                                                              des modernes.
                      Nous ne terminerons pas ce qui concerne   Le natron est un carbonate de soude que
                    la soude des varechs, sans mentionner une   l’on trouve tout formé dans la nature, et
                    source très-importante de ces plantes, source   notamment en Égypte, en Hongrie, en Ita­
                    qui a été récemment signalée comme pou­   lie (dans les provinces napolitaines), au Ti­
                    vant être exploitée avec profit pour fournir   bet, en Arabie, au Pérou, etc.
                    de l’iode et du brome.                      On regarde généralement le natron com­
                      Les varechs sont tellement abondants dans   me un produit qui ne fut en usage que
                    une partie de l’océan Atlantique peu dis­  dans l’antiquité, et dont notre génération
                    tante du continent américain, qu’ils consti­  n’a aucunement à s’inquiéter. Cependant
                    tuent, au milieu de l’Océan, une immense   il est des pays dans lesquels le natron se ré­
                    prairie d’un vert jaunâtre. Cette mer her­  colte encore et joue un certain rôle dans
                    beuse ou mer de Varechs (de Sargasso,     l'industrie locale. Force nous est donc d’en
                    comme l’appellent les Portugais) s’étend sur   parler.
                    un espace à peu près équivalent à la surface   Les lacs qui fournissent du natron en
                    de la France. Elle est formée par le fucus   Hongrie, sont situés dans le comtat de Bi­
                    natans dont les touffes, sans attaches au sol,   har, entre Debreczin et Grossvaradin. On
                    sans racines, s’alignent dans la direction du   donne à ces lacs le nom de Feyrto {lacs
                    vent et du courant. Des sondages faits dans   blancs}, en raison de la blancheur de leur
                    cette mer en 1851 et 1852, ont donné      sable, pendant l’été, lorsqu’ils sont à sec.
                    des profondeurs variant de 2,600 à 7,000   Ce carbonate de soude naturel qui est exploité
                    mètres.                                   depuis un temps immémorial, est utilisé
                      Un capitaine de vaisseau, M. Leps, qui a   aujourd’hui dans les nombreuses savon­
                    particulièrement étudié ces parages, pense   neries de Debreczin.
                    que ce goémon ou varech pourrait être uti­  En Égypte, c’est principalement de neuf
                    lisé pour l’industrie et l’agriculture, plus   lacs situés dans le désert de Thaïat, ou de
                    facilement encore que celui des côtes de   Saint-Macaire, à l’ouest du Delta, qu’on
                    Bretagne. Des bâtiments prendraient aisé­  rencontre le natron. Sicard et Volney ont
                    ment un chargement de la plante compri­   décrit deux de ces lacs. Leur lit est une ca­
                    mée en ballots. Les navires pourraient même   vité de trois à quatre lieues de longueur, sur
                    être munis des ustensiles nécessaires pour   un quart de lieue de largeur. Leur fond est
                    brûler les varechs sur place, et se charger   solide et pierreux. Pendant une partie de
                    seulement des cendres de ces végétaux.    l’année, ils sont à sec ; mais en hiver, une
                      Ce serait là une assez bonne spéculation ;   eau d’un rouge violet arrive et les remplit
                    car l’iode, qui ne s’extrait jusqu’ici que des   presqu’à deux mètres de hauteur. Au re­
                    varechs jetés par la mer sur les côtes, est  tour des chaleurs l’eau s’évapore, et il reste
                    d’un prix assez élevé, et tend encore à en­  alors une couche de natron, qu’on détache
                    chérir par suite de l’emploi récent de ce pro­  à coups de barre de fer.
                    duit dans la fabrication d’une matière tinc­  Le natron est d’un blanc grisâtre ; sa sa­
                    toriale verte. L’iode est d’ailleurs en si petite   veur est salée et légèrement alcaline. Il se
                    quantité dans l’eau de la mer, qu’il ne faut   compose de carbonate de soude, mêlé à une
                    pas moins de 30 millions de kilogrammes   grande quantité de sel marin. Sa richesse en
                    de cette eau pour fournir aux algues 1 ki­  carbonate de soude ne va que depuis 12 jus­
                    logramme d’iode.                          qu’à 25 pour 100. Le natron de Tripoli en
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