Page 489 - Les merveilles de l'industrie T1
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LES SOUDES ET LES POTASSES                               485


           « prendre ses travaux et de leur donner une   partout actif et méritant. Il est correspondant de
                                                     l’École des mines, régisseur des poudres et salpê­
           « nouvelle activité. »
                                                     tres, membre du Lycée des arts, du Bureau con­
             Le 12 frimaire an IX, Fourcroy lui an­  sultatif, du Directoire de conservation des objets
           nonce un commencement de justice, grâce à   d’art et de science, etc., etc.
                                                       «Lacépède, Fourcroy, Haüy, Berthollet, Vauquelin
           la bonne volonté de Chaptal, alors ministre.
                                                     et d’autres encore, lui prodiguent les expressions
             Le 11 prairial an XI, sur le rapport de   de leur affection et de leur estime.
           trois de ses membres, Vauquelin, Molard et   « Le gouvernement l’envoie dans le Tarn et l’A­
           Guy ton de Morveau, la Société d’encoura­  veyron, diriger, faire renaître des mines d’alun;
                                                     il s’y rend et donne à ces exploitations une impul­
           gement pour l'industrie nationale., alors nais­
                                                     sion heureuse.
           sante, décidait qu’une somme de 2,000       « Il explore le plateau de Larzac, près Milhau, et
           francs, qui représentait ses premières éco­  il en dévoile toutes les richesses minérales. De
                                                     tous côtés, il porte un œil intelligent ; s’il aperçoit
           nomies, serait confiée à Leblanc, pour l’ai­
                                                     des richesses qui, dans la tourmente, sont menacées
           der à mettre de nouveau en activité la    de se trouver perdues, il les sauve. «Il s’occupe avec
           manufacture dont il avait repris posses­  une intelligence, qui est celle d’un maître, de tout
           sion. « Ce secours s’adresse, disaient les   ce qui est monument, par rapport aux arts, aux
                                                     sciences, aux lettres, à l’histoire ; et, en passant à
           « rapporteurs, à l’homme probe et intel-   Albi, il fait la description de la cathédrale de cette
           « ligent qui pendant la Révolution a rem-   ville, en homme initié à tout ce qui est grand en
           « pli avec honneur diverses fonctions publi-   architecture et en archéologie.
                                                       « Rentré à Paris, après trois ans des plus dures
           « ques fort importantes, qui le premier a
                                                     fonctions, il occupe les sociétés savantes et l’Aca­
           « conçu l’idée d’une fabrique de soude arti-   démie des sciences de ses travaux et de ses recher­
           « ficielle, qui l'a exécutée en grand avec   ches; il lit des mémoires sur le nickel, sur l’alun,
           « tout le succès qu’on pouvait désirer, et   sur le sulfate de magnésie, sur le cobalt, sur l’am­
                                                     moniaque, sur les matières dont on peut l’extraire
           « qui, par son exemple, aurait affranchi la   avec économie; il expose des procédés nouveaux
           « France du tribut qu’elle paie à l’étranger   touchant la production et l’extraction du salpêtre.
           « si les malheurs de la Révolution n’eussent   Sur la demande de la Régie des salines, il convertit
                                                     le sulfate de soude en carbonate de soude par des
           « interrompu ses travaux. »
                                                     moyens perfectionnés. Il s’occupe de rechercher et
             Mais ces témoignages de sympathie et ces   il trouve des procédés jugés précieux, par Four­
           offres de secours étaient insuffisants pour   croy et Vauquelin, pour utiliser les immondices
                                                     de Montfaucon ; il rédige un savant et judicieux
           atteindre le but que Leblanc se proposait. ■
                                                     Mémoire sur l’influence des arts chimiques dans
           Aux prises avec la misère, fatigué de ses   la production des engrais; et, par avance, il pré­
           longues et toujours inutiles tentatives pour   voit tous les services que la chimie rendra lors­
           obtenir justice, impuissant à arracher sa   qu’elle viendra dévoiler à l’agriculture le secret
                                                     des substances qui concourent au développement
           nombreuse famille à la détresse qui l’acca­
                                                     des plantes. Chaptal, ministre alors, avait très-favo­
           blait, il tomba dans un profond et morne   rablement accueilli ce travail, et Fourcroy s’y in­
           désespoir. Le 16 janvier 1806, il se frappa   téressait vivement.
                                                       « D’autres idées, non moins fécondes, bouillon­
           au cœur d’un coup de poignard.
                                                     naient encore au cerveau de cet homme, lorsqu’il
             Telle fut la mort d’un bienfaiteur de l’hu­  fut assailli par cet affreux désespoir qui quelque­
           manité !                                  fois s’attache, et bien funestement, aux génies fé­
                                                     conds que l’impuissance accable. »
             « C’était pourtant un homme puissant d’imagina­
                                                       On voit, par cette simple énumération
           tion et de savoir, nous dit l’auteur d’une courte
           notice sur Nicolas Leblanc. On le trouve six fois   de ses travaux, que l’inventeur de la soude
           nommé administrateur au département de la   artificielle était un savant d’un ordre élevé,
           Seine, membre de l’Assemblée législative, commis­
                                                     et qué ses connaissances étendues, son gé­
           saire dans toutes les hautes questions de science,
           d’art, d’instruction, d’ordre et d’économie politi­  nie varié, auraient encore rendu à la science
           que. Il est membre de toutes les sociétés savantes,   d’importants services, si une mort affreuse
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