Page 154 - Bouvet Jacques
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Certes, ce n'était pas là, on le voit, des amitiés
de cabale ou de clocher. Du reste, on voyait aussi 1
de grands personnages dans le monde s'hono-
rer de cette amitié. M. Bouvet profitait de
l'ascendant qu'elle lui donnait sur eux pour les
ramener ou les fortifier dans la pratique de la
religion, ou pour les intéresser à ses entreprises.
Mais ses relations avec les séculiers, même les
plus religieux, portaient toujours un caractère de
dignité et de réserve. Les gens du peuple : voilà
le milieu où il se sentait le plus à l'aise; il parlait
leur langage, s'enquérait avec le plus cordial inté-
rêt de leurs petites affaires ; distribuait, selon la
circonstance, des conseils, des encouragements.
des consolations ou des secours, et les quittait
emportant leurs bénédictions. Quoiqu il fût bien
éloigné de rechercher la popularité, on ne sait
depuis quand Annecy n'avait pas vu un nom aussi
populaire que celui de M. Bouvet, et, quand il
traversait les rues, il recueillait les témoignages les
plus universels du respect et de l'attachement.
Cette affabilité, qui lui conciliait les cœurs, il la
pratiquait envers tout le monde. Dans les excur-
sions qu'il faisait quelquefois à Genève, il liait
volontiers une petite conversation dans les ma-
gasins, plaçait quelque innocente malice ou quel-
que bienveillante parole, qui déridait ces fronts
souvent si rembrunis et faisait dire, après son
départ : Tiens I voilà un aimable curé I
" Dans un voyage qu'il fit en Chablais, avec sa
domestique, qui était du Lyaud, il avait pris son
petit sifflet de voleur. A l'entrée du Lyaud, il
siffle comme autrefois ... On n'en pouvait croire